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Échappée Belle 2019 – « Intégrale, Intense, Intransigeante… »

Lacs Doménons

Comme chaque année après les fêtes il est temps de se trouver encore un petit truc à se mettre sous la dent, histoire d’éliminer les abus totalement volontaires et assumés de la fin d’année… une bonne raison de se focaliser sur quelque chose, où juste l’idée d’y penser nous fait déjà brûler quelques calories en plus avec cette palpitation cardiaque de l’envie…

Avec mon appétit dévorant mais surtout un petit nouveau dans la famille, il faut savoir être raisonnable. Ce n’est pas vraiment de mon côté qu’il faut chercher la voix de la sagesse à la maison… mais une fois les synapses connectés, la voix arrive néanmoins à faire son petit bonhomme de chemin et finalement à atteindre mon cerveau.

L’envie de nouveau d’aller faire le fou attendra une année supplémentaire et créera une motivation décuplée en 2020. Et puis soyons honnête, dans le coin on a quand même le choix de belles courses en montagnes et il suffit juste pour cela de sortir le nez par la fenêtre. Cela tombe bien car depuis notre nouveau chez nous, je vois pointer quelques sommets à travers la fenêtre de la chambre. Les plus hauts du coin, les plus sauvages et surement parmi les plus beaux. Bon c’est vrai que tu regardes une fois, deux fois, trois fois, tu tournes les yeux en l’air afin de savoir ce que ton cerveau penses ! Allez pourquoi pas l’Échappée Belle… l’Ultra traversée de Belledonne… Belledonne aux pentes raides aux sentiers qui parfois n’en sont pas, aux pierres, aux lacs et à ses paysages sauvages.

Banco cette année ça sera l’Échappée Belle intégrale !!!

Après se pose la question en solo ou en duo car le format duo du début à l’arrivée est quelque chose de vraiment sympa… Je demande à l’ami Sam s’il veut en être et comme il n’est pas toujours facile de prévoir longtemps à l’avance ça sera en Solo. Mais même en solo on a le droit à un « PACER » c’est top ! Bon alors Pacer au début tu te dis qu’on va te coller un patch pour te suivre car c’est un massif sauvage etc… mais non c’est 100 fois mieux, tu as le droit de te faire accompagner à partir de la 1ère base de vie par un pote qui partage finalement les 2/3 de la traversée avec toi… ça sera Sam le pacer Deluxe.

Sur le papier l’Échappée Belle c’est 149km et 11400 D+, un départ de Vizille et une arrivée à Aiguebelle en Savoie. L’idée de la traversée d’un point A à un point B me plait et je trouve, d’une manière totalement subjective, que cela colle à un format d’aventure. La diagonale et le trail de l’Étendard que j’ai déjà courus, sont sous ce format et j’aime ce concept. Bon par contre par rapport à l’UT4M c’est le même dénivelé mais avec 20 km de moins… ça va piquer !

Au vu du terrain et de mes 3 années de trail derrière moi, je vais essayer d’élaborer un peu ma prépa et mon matos, pour toujours continuer à peaufiner mon expérience… « it’s time to play » comme disent certains … moi je dirais it’s time to « fucking » play avec au programme jonglage de cailloux, glisse sur rocher abrasif, des acrobaties et numéro d’équilibriste le tout avec des ravitos moins nombreux, un sac plus lourd et un peu moins d’oxygène 😀 … encore un bon panel d’ingrédients pour marquer le corps et l’esprit.

Le 15 janvier ouverture des inscriptions et il ne fallait pas trainer si on ne voulait pas qu’elle nous échappe…c’est qu’elle commence à avoir sa renommée malgré sa notoriété de course la plus dure… effrayante autant qu’attirante, une aventure toute en contraste et en relief !!!

8 mois pour se préparer et essayer d’arriver dans les meilleurs conditions possibles pour cet ultra qui ne laissera pas de place à la chance. Du  coup il va falloir se forger les mollets et les cuissots pour absorber ce massif. La préparation sera axée principalement sur des ratios deniv/km importants… en 2019 pas une seule session de piste ou de VMA à proprement parlé… Belledonne est le royaume de la lenteur donc soignons la hauteur.

La préparation s’est bien déroulée dans l’ensemble malgré une foulure à la cheville droite en janvier et à la gauche en juin 😀 … au moins ça équilibre. Changement de chaussures et passage sur des Mafates Speed 2 qu’il a fallu apprivoiser mais qui m’ont procuré un réel gain de confort.

Le fait d’être au Pont de Claix m’a permis pendant l’année de me faire des vélo taf / retour Taf ou des footing à Jeun pour aller bosser dans le centre de Grenoble. l’année avançant et l’échéance  approchant, je déviais de plus en plus pour passer par le Rocher de Comboire, puis Châtelard – les 3 pucelles, voir le Moucherotte ! … bon ok, gros détour mais travail de frontale et 25km avec 1800 de D+ avant d’aller bosser :-D. J’ai également optimisé mes pauses déjeuner en déplacement en emportant les baskets plutôt que de me faire de grosse pause déj. Et enfin, et pas des moindre, pour la gestion du sommeil j’ai pu pendant les 9 derniers mois bénéficié de l’aide de Milhan pour la gestion du sommeil avec des nuits entrecoupées de 2 à 5 réveils… 😀 

 

Vendredi 23 août – 6h00 – Vizille 

« L’inconnue des sensations du départ »

depart
Une belle brochette au départ … où est Charlie ?

Rentrons maintenant dans le vif du sujet.

Le départ se fait dans le parc du château de Vizille et un cadre superbe pour lancée cette Échappée Belle. Nous arrivons une petite heure avant le départ avec l’assistance de choc et on sent cette atmosphère d’avant course avec des regards un peu hagars, des yeux dans le vague et des sourires crispés. L’inconnue des sensations et les doutes de cette aventure se lit sur les visages.

Je me positionne sur le devant sous l’arche de départ et comme l’an dernier ça ne se bouscule pas pour les premières places. En m’avançant je croise et papote avec Florentin qui s’attaque au format XXL de l’épreuve après avoir déjà gagné les 85km il y a quelques années.

2 mn avant le départ je vois une silhouette longiligne s’avancer sur la ligne de départ. François (D’Haene) se positionne pile à côté de nous et à ce moment précis une effervescence de téléphone et appareils photos avec les flashs se déclenchent. Si certains étaient encore dans le « coltard » et bien là c’est bon on est bien réveillé. On se rend compte l’histoire de quelques instants ce que cela fait d’être connu au sein de la discipline et on ne peut s’empêcher de sourire 😀

A ce même moment je me dis qu’avec mon 1m94 et mes 78 – 80kg et bien François est quand même sacrément affuté. Il doit bien faire 4-5 kg de moins que moi et que ça doit aider pour monter ses fesses plus vite en haut des montagnes. Je m’imagine en l’espace d’une seconde partir sans mon sac de 4kg sur cette aventure… c’est sûr que ça ne ferait pas tout mais juste se sentir léger comme un élite !

« Gestion gestion gestion » scande le directeur de course, les bras en l’air, le décompte et nous voilà partis pour l’Échappée Belle 2019.

Les 2 premiers km se font entre 13 et 14 km/h à travers le parc avant d’attaquer les premiers 1500 m D+ passant par Mon sec et le col de la Madeleine. Je rétrograde un peu afin de prendre mon rythme et on en profite avec un groupe de coureurs pour papoter et faire nos pronostics et échanger sur nos dernières aventures.

 

Le Foyer de Ski de fond de l’Arselle / 16,7km / 1540 D+ / 2h21 / 39ème

« Encore le sourire au coin des lèvres »

Arselle

La première montée s’est bien passée (heureusement d’ailleurs) et en arrivant à l’Arselle déjà pas mal de monde pour nous accueillir. Sur les ravitos, notamment au début, l’idée est de ne pas perdre trop de temps. Mais attention à ne pas les négliger non plus car ils sont espacés et il ne faut surtout pas se déshydrater ou mal se ravitailler sous peine de se mettre un gros handicap très rapidement.

POst Arselle
On repart motivé de l’Arselle

En 4mn je recharge mes gourdes de 800 ml je mange un peu et hop direction une section que je connais par cœur jusqu’au refuge de la Pra. On commence petit à petit à rentrer dans des sections techniques et il faut bien rester concentrés pour la pose des pieds. Col de l’Infernet, col de la Botte et arrivée sur les lacs Roberts et déjà des superbes paysages avec un temps magnifique.

Lacs roberts

Je constate assez rapidement que mes gourdes perdent beaucoup d’eau et mouillent pas mal mon tee-shirt…le « press to drink » et bien il n’y a pas besoin de presser…la pression exercée par mon sac flambant neuf (car le SAV Raidlight vient de me le changer suite à une fermeture éclair défaillante) appui plus fort que celui que j’avais déjà rodé depuis quelques mois. A ce moment précis je me remémore les conseils de M. Antoine Guillon expliquant qu’il ne faut jamais partir avec du matos neuf sans jamais l’avoir testé avant…. Et bien voilà ma première petite erreur et je me rends compte que j’ai déjà perdu plus de 500 ml de flotte sans rien boire … arghhh !!!! J’essaye d’analyser la situation en me disant « je vais envoyer un sms à l’assistance pour qu’il me rapport mes flasks souples » … « Ah mais mince je ne vais pas les voir avant le Pleynet soit dans 8, 9h » « et puis si je prends les flasks, elles ne font que 600ml et outre le fait d’être en dehors de matos obligatoire je ne vais pas avoir assez de réserve pour la suite aux vues des conditions météos ». En conclusion, l’idée sera d’enlever le tube du bouchon pour éviter la fuite et de m’en servir de paille pour boire !! et cela veut dire aussi, de sortir les gourdes à chaque fois à travers les bâtons que j’accroche devant !!! yeah yeah yeah, ça va être bon ça pendant plus de 130 bornes hein ? Mais je vous rassure il y a un côté positif : je vais savoir exactement ce que je bois et ce qu’il me reste, soit une analyse au millilitre près de mon hydratation. Allez, je garde cette approche positive pour ne pas perturber plus que cela mon influx nerveux.

Vers la Pra

Au moins cela m’aura un peu occupé l’esprit et la prairie verdoyante avant le refuge de la Pra arrive déjà !

 

LA PRA
La vue du refuge de la Pra (lors de ma reco de juillet)

Refuge de la Pra / 27,3 km / 2390 D+ / 4h18 / 36ème

« Au tempo et maitrise des éléments »

Arrêt de 6 mn pour bien boire et goûter la soupe préparée par des bénévoles au top ! On va s’élancer à l’assaut du plus haut sommet de la traversée, la Croix de Belledonne. Les sensations sont bonnes et je décide de lâcher un peu les chevaux. La section est magnifique en longeant les lacs du Doménon.

lacs doménons 2
Lacs du Doménon (Reco juillet 2019)

Un petit passage technique où il faut mettre les mains lors du contournement de la cascade et l’on de bifurque vers la croix. On rentre dans le Belledonne minéral et ses rochers acérés. Encore un peu de neige avant d’atteindre la dernière partie. On croise déjà les premiers qui redescendent.

Croix de Belledonne
Un petit névé avant la traversée des Rochers Rouges vers Freydane

 

Croix de Belledonne / 32,1 km / 3190 D+ / 5h36 / 33ème 

« Descente panoramique et portion magique »

Le temps est au beau fixe et dégagé ce qui permet d’avoir une vue 360° de toute beauté. Je m’étire pour toucher cette croix et je ne traine pas trop car il fait frais et j’ai déjà de toute manière quelque belles photos du coin prises lors de ma 2ème reco.

lac Blanc Croix de Belledonne

Alors oui c’est vrai je n’en ai pas parlé avant mais je me suis calé, dans ma phase de montée en puissance et en volume en juillet, quelques belles recos et je peux vous dire que c’est vraiment un avantage sur ce type de parcours. Je pense d’ailleurs que certains coureurs doivent arriver avec des témoignages « tu verras c’est très dur ! » « c’est particulier Belledonne, tu ne progresses pas vite » etc… la plupart doivent se dire « oui je vois j’ai déjà fait des trucs difficiles »…oui peut être mais pour avoir une vision juste une ou deux sorties de quelques heures dans les sections en rouge noir ou violet du road book recadrent bien les choses voir évitent la panique le jour J (ou la nuit).

Du coup la Croix de Belledonne… « done » et j’attaque la section toujours prudemment vers le col de Freydane. Un coureur Nicolas, avec qui je discutais au début, me double à vive allure dans la descente et me lance « et il faut vraiment que tu progresses en descentes toi ». Un peu vexé sur le coup je réplique avec un peu de retard un mauvais truc du genre que j’y vais cool pour pas trop casser de fibre ou un truc dans le genre… En règle générale j’ai pas la réputation d’être un mauvais descendeur mais c’est vrai qu’il est à l’aise dans les cailloux lui.

Bref pas de panique, chacun sa course et avant Freydane je reviens sur le premier Duo de la team Waa avec Luca Papi et son compare. Ah tiens comme l’an dernier on va se faire un bout de chemin encore ensemble. Je me cale derrière lui et on papote un peu comme l’an dernier, enfin surtout lui car il a la tchatche le Luca 😀 

Une vue superbe s’offre à nous le long de la descente avec le Lac Blanc et sa couleur turquoise… magique ! Les paysages sont vraiment magnifiques sur cette partie et comme je suis frais j’apprécie à fond ces moments. On pourrait se croire dans une épopée avec Frodon, Sam et Gandalf à la recherche de la Cloche sacrée !

Lac Blanc

 

Refuge Jean Collet / 38,4 km / 3275 D+ / 6h47 / 34ème

« Le début des choses sérieuses »

Jean Collet

Ce refuge est vraiment top avec un panorama extraordinaire sur la vallée du Grésivaudan et la chaine de la Chartreuse. Le transat superbement orienté invite à se glisser dedans mais malheureusement ce n’est pas le jour pour. Je me fais un bon ravito car on commence à sentir la chaleur et cela fait quelques temps qu’on reste au-dessus des 2000 et ce n’est pas fini. Je salut Emilie la copine de Luca  (mais le Luca de la Team NTM) qui me sert une bonne soupe histoire de garder de précieux sels minéraux. 8mn de pause avant d’attaquer une portion très technique avec le col de la mine de fer, sous la brèche et roche fendue. Rien qu’avec les noms on devrait savoir automatiquement qu’on va en chier sur cette portion. Et ça sera mon cas, je ne sais pas si c’est psychologique ou pas mais généralement au bout de 7h d’effort et de ces 40 45 km j’ai souvent un coup de moins bien. En plus depuis la Pra, j’avais un peu moins écouté mon corps car j’étais à l’aise. L’heure est venue à la concentration sur l’effort pour canaliser l’énergie correctement. Je lève un peu le pied tout en m’imposant un petit rythme car je sais que la route est encore longue. Après la Roche fendue on traverse ces fameuses zones violettes ou il n’y a effectivement pas de sentier et on saute plutôt de rocher en rocher en essayant de ne pas se faire une cheville. Je reste collé aux baskets de Luca et on recommence à voir un peu de végétation et même à chiper des myrtilles quand cela est possible !

Une petite descente nous amène au Habert d’Aigubelle lieu du prochain ravito.

Aigubelle

 

Habert d’Aigubelle / 47,2 km / 4020 D+ / 9h00 / 36ème

« Gestion, Gestion, Gestion »

Voilà là on est dans le concret de Belledonne, 7/8 km depuis le dernier ravito 700 de D+ mais plus de 2h pour faire la portion, je vous laisse imaginer la portion :-D. Au Habert d’Aiguebelle il fait chaud et en plus je commence à sentir un peu la fatigue arrivée alors je me pose un peu pour bien me ravitailler. Je tombe sur Fabrice (D’Aletto) qui me raconte avoir fait une mauvaise chute et une côte fissurée. L’aventure s’arrête ici pour lui malheureusement. Belledonne ne permet pas d’écart, un autre costaud, Sébastien Chaigneau a été même héliporté suite à une grosse chute au visage un peu avant.

Je repars sur une portion que je ne connais pas, car à ma dernière reco j’étais repartis dans l’autre sens au Habert pour rejoindre le lac de Crop puis le Col de la Sitre… ça grimpe régulier mais on finit par un raidard où il faudrait pas grand-chose pour basculer en arrière. A ce moment-là je suis revenu sur le Duo Papi / Deyrier. Une brève descente pour finir les derniers dénivelés pour atteindre le col de la Vache. Ce passage est vraiment beau mais chaotique et technique. On se retrouve dans un pierrier et il faut bien regarder encore une fois où poser les pieds. Je suis dans un moment beaucoup moins agréable aux niveaux des sensations et dans la descente je me sens moins à l’aise et je galère un peu. On longe les lacs des 7 laux et on est dans des paysages sublimes.

On attaque ensuite une longue descente caillouteuse et en voulant m’accrocher un peu je loupe un appui et je me retrouve à glisser de tout mon long sur un rocher, tombant sur les genoux pour finir ma cabriole 2 m en contrebas. Ah ben celle-là elle devait être belle à voir, ça faisait quelque temps qu’elle me guettait cette vilaine chute et là voilà. Luca juste derrière moi et le coureur de devant m’aide à m’extirper des ronces. Je commence à regarder un peu les bobos et j’entends la voix de Luca…. « ça va ? non non ne regarde pas cours, si tu peux courir ne t’arrête pas et tu verras plus tard » Machinalement je repars je sens un peu les genoux mais pas plus que ça. Luca me redemande « ça va tu arrives à courir ? » je réponds que oui  et il me dit « ben c’est que c’est bon alors ». Et bien oui voilà comment on gère une belle chute on repart direct et si rien de particulier se passe et bien autant ne pas trop s’y attarder. Bon j’ai quand même eu de la chance car j’aurais vraiment pu mettre le cligno sur ce type de valdingue. On enchaine une longue portion pas très dure mais qui nous fait contourner le flanc d’une montagne alors que l’on voit la base de vie du Pleynet vraiment pas loin. Cette portion entre Habert d’Aiguebelle et Pleynet est longue et je commence à être à sec au niveau flotte. Je ne suis pas au meilleur de ma forme mais je reste concentré et j’attends que ce moment passe. Dans peu de temps je vais revoir les parents et surtout Sam qui va pouvoir m’accompagner. Rien que d’y penser je déroule sur les 2 derniers km pour arriver enfin sur la base de vie.

 

Base de Vie Le Pleynet / 64,1 km / 5220 D+ / 13h06 / 42ème

« Rechargement des batteries pour l’arrivée de la nuit »

 La dernière portion n’a pas été évidente et ça se voit au niveau du classement. En arrivant Je vois Sam dans les starting blocs… ça fait plaiz un peu de voir des têtes connues.

Les parents ont préparé une assistance aux petits oignons… les affaires sont sortis du sac et une chaise m’attend. Je me pose et je suis assez lucide pour savoir ce qu’il faut faire. Je défais mes chaussures et enlève mes chaussettes. Cela fait quelques kilomètres que j’ai mal aux gros orteils et que j’ai des fourmillements… Les descentes et les cailloux ont déjà entamé mes bouts de pieds ;-). Je m’alimente bien, salé sucré, je m’hydrate bien… et le nec plus ultra un petit massage de 5mn par le père…. Ça ne peut pas faire de mal après cette portion bien cassante. Le temps passe vite et je me serais arrêté 34 mn à la base de vie. C’est un peu plus long que ce que je pensais mais vu l’espacement des ravitos ce n’est pas du luxe non plus.

Je repars en manche longue car la nuit ne va pas tarder.

Sam part devant sur une portion beaucoup plus cool en sous-bois direction la Ferrière et Fond de France. Par contre on sent bien qu’il est frais comme un gardon car dès qu’il y a des petits talus ou des relances j’ai du mal à la suivre !!!

On papote un peu et maintenant ça va bien être sympa de partager cette aventure à 2. On arrive au début de la montée de la Valloire. Cette montée on l’a déjà fait à 2 un mois auparavant. Sam met le tempo et la nuit commence à tomber. Le rythme est nickel, je suis concentré sur mon effort et sur les chaussures de Sam. De courir ensemble régulièrement ensemble ça aide quand même car je pense qu’on sent plus facilement si l’autre va bien ou pas… en fonction de l’attitude de l’essoufflement. Bon par contre je préviens Sam que je vais être un peu moins bavard dans les montées mais ce n’est pas grave cela ne l’empêche pas de mener et le rythme et la discussion. On a déjà rattrapé un ou 2 concurrents dont certains avec des pacers également.

900 D+ un peu plus loin on sort petit à petit de la forêt et on attend le premier chalet de la grande Valloire… super accueil des bénévoles avec une petit thé ils nous remplissent les gourdes et hop on essaye de ne pas trop trainer. Cette portion est sur un single en flanc de montagne un peu vallonné. On longe ensuite le lac du léat et on plonge sur Gleyzin. On rattrape Florentin qui a un gros coup de moins bien et est en hypo depuis quelques heures. On lui dit de s’accrocher mais il nous encourage et nous laisse filer.

 

Gleyzin / 80,9 km / 6355 D+ / 17h11 / 36ème

« L’enchainement sauvage »

On arrive au Ravito et les parents ont dû monter en navette. De leur côté la fatigue doit se faire sentir aussi car on les voit assis dans un coin et même avec nos signes pas de réaction de leur part 😀 . Ils finissent par nous voir après 1 ou 2 mn. On s’engouffre sous la tente du ravito car dès qu’on s’arrête on commence à sentir un petit air frais.

Super Collet
Prêt pour une nuit de folie avec Sam 😛

Les bénévoles ont préparé une bonne soupe et une compote de fruits…on mange bien et on boit en se posant un peu. La prochaine portion c’est un peu l’enchainement « Roche Ancrée – Maïdo » de la Diag des fous avec la montée du col du Moretan… La montée se fait progressivement mais finis par des portions très raide et bien évidemment sans chemin dans un pierrier 😀 . On arrive au refuge de l’Oule qui nous permet de faire une micro pause et d’avaler un café avant de repartir. Sam mène toujours le rythme et ouvre la voix sur une portion bien plus raide. C’est quand même un sacré avantage et une économie de ne pas chercher sa route et de rester concentrer juste sur sa progression. De plus les fanions très bien placés permettant de se faufiler vers ce col au fin fond de la nuit sans risque. Une petite guirlande de frontale se dessine sur ce col. Seul je pense qu’il y a bien moyen d’être un peu moins tranquille. Je me rappelle l’histoire de Sam qui en 2015 lors de sa traversée était seul entouré des tirs à canon pour éloigner les loups des troupeaux. Cette année on est tranquille car aucun tir n’a retenti.  Je m’accroche bien dans cette montée et on commence à voir pointer la fin de ce col. Je monte un peu dans les tours niveau cardio mais je me sens bien. Le col est quand même à 2500m d’altitude et on peut que saluer les bénévoles qui nous encouragent chaudement à 1h40 du mat !!! 2h10 pour monter ce col de 1500 D+ très accidenté de Gleyzin avec 80 bornes dans les pattes alors que lors de mon repérage j’avais mis 1h45-50 en commençant de Gleyzin frais comme un gardon. C’est un peu ça la magie de l’ultra, sur certaines sections tu te surprends à être juste bien !

col du moretan 2
Le haut du col lors de la reco

 

Col du Moretan / 87km / 7741 D+ / 19h40 / 33ème

« Dans le profond du dur »

C’est parti pour une bonne descente en rappel sur un Névé… En temps normal y’a moyen de bien s’amuser mais là avec la bonne section dans les pattes et en pleine nuit… cette descente me met un peu sous pression… j’essaye de suivre Sam en m’accrochant et en glissant sur la longe mais j’avoue que je ne suis pas super à l’aise 😛 …La corde avec la neige le froid me brûle un peu les mains et je manque de m’en mettre une tous les 10m… au bout de 200m ça ne loupe pas et hop sur les fesses. Je crois que cette section m’a bien fait monter le cœur tellement je ne contrôlais aucun de mes mouvements.

Col du moretan
La descente de jour 🙂

A la fin du Neve on tourne à gauche et on repart sur le même délire le long d’une arrête en direction des lacs. L’air de rien en 1km on perd 400m d’un coup.

Descente Moretan
Descente du Moretan de Jour – Sympa le sentier 😀

Encore un bout de passage chaotique dans des gros rochers avant de longer les superbes lacs supérieur et inférieur du Moretan qui annonce un terrain plus souple dans l’herbe où la pente s’adoucit en direction de Perioule.

Moretan Supérieur
Lac du Moretan Supérieur
Moretan Inférieur
Lac du Moretan Inférieur

Je balance à Sam que la section m’a fait un peu mal et que je ne suis pas bien du tout avec une légère envie de vomir … Montée un peu forte et descente stressante conjuguées m’ont procuré comme un enchainement de shooter de fin de soirée, genre le petit shooter liquoreux que tu n’aimes pas mais que tu bois et au moment du contact avec ta bouche tu sens déjà la grosse erreur !!!

A Perioule je me pose et mange des pommes de terre, je m’hydrate bien et prend de la soupe. Un arrêt de 12mn avec quelques respirations profondes me permettront de repartir en bon état.

On repart sur une descente sympa mais un peu technique avec des rochers et des racines mais Sam mène toujours la danse et on descend relativement bien toujours en discutant. Bon c’est vrai que pour le coup je me rappel pas toujours du sujet de toutes nos discussions. Alors soit je rêvais soit il faudrait que je lui demande 😀 

On arrive au pied de la montée de la Pierre au Carré. Alors à partir de maintenant je ne connais plus du tout ce qui m’attend car en reco j’avais bifurqué à gauche pour revenir sur Gleyzin. Cette montée et bien elle est pas fun du tout, c’est raide tout droit et monotone… et pour couronner le tout j’ai mon réveil que j’avais mis à 4h15 à la vielle qui commence à sonner. Le téléphone est dans mon sac au fond dans une poche fermée…. Je dis à Sam que normalement y’a 5 x 3 répétitions et que ça devrait s’arrêter… et ben non jamais le réveil ne veut s’arrêter. On sent bien que cela commence à agacer tout le monde mais que personne ne dit rien et que surtout tu n’as pas envie de couper ton effort dans cette longue montée après 22H d’effort à 4h du mat 😀 … Et bien le réveil est tenace et au bout de 10 mn il aura raison de ma patience et je m’empresse de chercher enfin ce maudit téléphone pour éteindre ce « p…. » de réveil ! Pour la prochaine ne pas oublier d’éteindre son réveil car déjà en temps normal ce n’est pas le moment préféré de la journée.

On finit la montée et on croise quelques randonneurs qui comme souvent nous donne de faux espoirs sur le temps, le dénivelé et la distance pour rejoindre la prochaine base de vie…

« oui c’est dans 30mn environ » « vous arrivez dans 1km et ça descend tout le long » Alors la fatigue doit biaiser un peu mon souvenir mais c’était pas du tout ça !!!

La dernière partie pour arriver à Super Collet est un peu longue, Sam commence un peu à fatiguer (ah ben enfin 😉

 

Super Collet / 100,7km / 8395 D+ / 23h22 / 31ème

« En mode pilotage automatique »

Nous voici enfin à la 2ème base de vie. L’assistance toujours au top et là avec nos affaires.

On se fait une bonne pause de 30 mn et Sam entame un petit som… Je me mets une couverture et tente de manger une soupe chinoise (mais pas assez chaude l’eau et les pâtes dures… beurk) je me rabats sur du pain des bananes et un peu tout ce qui peut passer.

Un petit massage des jambes et on papote avec les parents. On commence à voir des bonnes têtes fatiguées à droite à gauche 😀

Allez hop on repart sur une piste de ski mais sans neige pour quasi 500mD+ histoire de se réchauffer… Le soleil se lève déjà et je me dis que j’aurais pu ranger ma frontale dans mon sac. Alors juste un petit aparté quand même car quasiment pile poil à ce moment-là François d’Haene franchissait la ligne à Aiguebelle en moins de 24h en faisant péter le record de course.

En haut du Col du Claran la vue est superbe et on voit en face les crêtes des Ferices. Je demande à Sam si on va là-bas de l’autre côté et il me répond que oui mais pas tout en haut. Je réaliserai 2h après qu’il m’avait un peu ménagé car si si on est bien redescendu en bas contournée par le fond du vallon pour remonter les crêtes et en face et bien tout en haut 😀

Arpingon

Vers le refuge des Férices on revient sur des coureurs et notamment le 1er duo Luca et Philipe de la Team Waa. Sam connait bien Luca et papote un peu. Je me souviens plus très bien mais Sam a dû sortir à Luca, « ben finalement tu l’as refait ? » et il a répondu « j’ai oublié que je ne devais plus revenir, mais là maintenant je me rappelle pourquoi » On sent quand même une bonne lassitude chez les autres et je ne sais plus si je pensais tout seul ou si on parlait vraiment mais j’ai des répliques du genre me reviennent « cette course est vraiment dur » « ils sont semés des cailloux et des pierres partout » « faudra vraiment pas que j’oubli de ne plus revenir » « qu’est-ce que c’est que cette course » …

On dépasse la duo et d’autres coureurs pour arriver sur le col d’Arpingon. Bien gratiné celui-là aussi, mais la vue est superbe et les couleurs magnifiques… c’est dur mais c’est beau à ce moment-là.

Sam ferices

Tibo ferices

On a doublé quelques coureurs, je me dis aussi que si on avait fait la course en mode duo du début à la fin avec Sam on aurait pu se bagarrer pour une victoire car finalement le premier on ne les reverra plus jusqu’à Aiguebelle avec plus de 45 mn d’avance. Mais bon avec des si….

On file sur Val pelouse à un bon rythme, le soleil nous réchauffe et c’est le moment de rien lâcher si on veut bien finir la course.

 

Val Pelouse / 118,1 km / 9909 D+ / 28h16 / 26ème

« On maintien le rythme et on relance »

Et l’air de rien on commence à remonter quelques places. On ne faiblit pas et moralement c’est toujours mieux dans ce sens-là. On essaye à Val Pelouse de ne pas trop s’attarder. On change de vêtement car il commence à faire chaud et on se ravitaille bien avant de repartir.

15 mn d’arrêt et on repart direction le Pontet. Après chaque Ravito on attaque toujours en montée. On sent quand même que le plus dur est dernière nous les paysages sont plus cléments malgré la fatigue. Je prends plus de relais maintenant et en mode gestion dans le col de la perche car la chaleur se fait bien sentir. En plus un coureur depuis Super Collet s’accroche toujours un peu derrière nous et j’avoue que j’essaye un peu de ne pas faiblir pour essayer de le distancer :-D. Je me suis en mode on n’essaye de rien lâcher jusqu’à l’arrivée. Après ce col je relance un peu sur des portions plus roulantes et où l’on peut courir. Les sensations sont bonnes sur cette portion. On va attaquer une longue descente après le col du Champet. Sam remet du rythme devant et j’essaye de le suivre tant bien que mal sans me mettre en difficulté. En plein milieu de la descente à la baraque à Michel un groupe de bénévoles nous encourage avec une table multicolore et remplis de bonbons. Obligé de nous arrêter et de se ruer (pour ma part) sur les bonbons… C’est un peu mon péché mignon à 20 km de l’arrivée. J’avais fait la même chose à l’UT4M au Sappey l’an dernier 😀 Ils nous annoncent également que des coureurs ne sont pas loin, que l’un d’entre eux marche car il est blessé et que un autre veut arrêter. On repart dans la descente à un bon rythme et je vois des énormes cèpes au bord du chemin. L’idée me traverse d’en ramasser mais je sais que le prochain ravito n’est pas tout de suite non plus et je m’imagine courir avec mes 2 cèpes dans les mains pendant 40 mn et ça me décourage… on attendra l’automne pour aller aux champignons ! Cette dernière portion pour rejoindre le Pontet est vraiment longue est inintéressante… on a même l’impression qu’on se décale sur la gauche pour revenir le long d’une longue piste nous emmenant au prochain ravito. Effectivement on double un coureur qui boite et on l’encourage je galère à suivre Sam sur cette longue ligne droite en faux plat montant ou je me force à courir. Je crois que cette portion doit le souler aussi car il a vite envie d’arriver au ravito 😛

Sam Val Pelouse

 

Le Pontet / 135,8 km / 10 741 D+ / 31h52 / 26ème

« Le terme de la traversée »

Pour info je pense qu’il y a un souci sur la place car on a commencé à compter un peu depuis Val Pelouse et on estime à la 21ème ou 20ème place à ce moment-là.  Bref je dis à Sam et aux parents qui sont là et toujours aux petits soins, qu’on ne va pas s’attarder pour en finir le plus vite possible. 8 mn de pause le temps de manger un peu et de bien s’hydrater car le soleil commence à bien taper et puis nous sommes bien redescendus en altitude.

Tibo Val Pelouse

On repart en direction du Fort Mont Gilbert. Une portion pas très fun non plus mais ça sent la fin et on n’est pas si mal que ça on niveau du tempo. On n’a pas faibli sur cette deuxième partie de course… la preuve en est puisqu’on a remonté quand même quelques coureurs.  Pendant la longue montée sur Fort Gilbert on voit un coureur fondre sur nous… je me retourne et je me dis mince y’en a qui finisse vraiment fort. !!! Il nous double mais en fait il s’agit du pacer d’un coureur qui a arrêté au Pontet et du coup il se fait la dernière section à fond … ouf il a failli me mettre un coup de masse au moral lui dis donc ! Abandonner au Pontet alors que tu t’es fait le plus dur de cette traversée ça ne doit pas être évident… il faut vraiment être à bout. En haut de la montée on double un dernier coureur qui est cramé. On enchaine une petite montagne russe avant la descente sur Aigubelle. Alors la descente n’est pas la plus jolie mais elle est roulante et en fait ce n’est pas si grave. Tu déroules un peu, tu te remémores déjà un peu la traversée. Avec Sam on se dit que c’est bon on l’a fait cette traversée. La fatigue est là mais largement dopée par le plaisir d’avoir réussi à traverser Belledonne, en bonne compagnie et avec un super moment de partage. Avec Sam on s’amuse « bon on va quand même faire cette descente à fond pour bien se finir les cuisses quand même » ! C’est vrai que la douleur musculaire est vraiment plus supportable que l’an dernier sur la fin de l’UT4M ou bien sur la diagonale des fous finie sur une jambe.  C’est vraiment année après année, avec ses expériences, une meilleure connaissance de soi que finalement ont franchi des étapes sans s’en rendre compte en prenant plus de plaisir sur ces ultras défis.  Aiguebelle nous tend les bras. On longe côte à côte ce dernier km comme si finalement ce n’était que celui d’une petite sortie du dimanche. On entend la sono et le speaker dans le parc. Et à l’entrée de ce parc, qu’elle bonheur de voir Khaldia, Malya et Milhan… On marque un stop avec Sam en récupérant Malya pour qu’elle vienne finir cette superbe aventure avec nous main dans la main. Un peu timide on lui dit allez vient court, et d’un seul coup elle se met à partir au sprint vers la ligne d’arrivée et nous dépose littéralement avec Sam 😀

arrivée 2
On s’est fait déposer sur le sprint final 😀

On franchi enfin cette ligne d’arrivée qui est toujours synonyme d’émotions avec la traditionnelle cloche à faire retentir…

Voilà « Finisher » de l’Échappée Belle Intégrale 149,6 km / 11 400 D+ / 34h09 / 19ème

Arrivée Sam Tibo
FinisherS

Une superbe aventure partagée avec Sam, dont l’aide précieuse m’a aidé pendant quasiment 90km avec en prime des souvenirs pleins la tête, une assistance du tonnerre avec maman et papa que je remercie mille fois car sans eux on en serait pas là non plus et à ma petite famille Khaldia, Malya et Milhan qui me permettent toujours d’aller chercher au plus profond de moi et qui me soutienne quotidiennement.  

LA cloche
La fameuse
À la Une

UT4M XTREM « L’aventure à la maison »

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Allez hop c’est parti je vais essayer de ne pas faire comme la dernière fois avec mon Grand Raid de la Réunion 2017 ou j’ai tellement tardé à écrire les premières lignes, que finalement j’ai pas du tout fini mon récit pourtant commencé !

10 jours que ce 2ème Ultra Trail XXL vient de se finir, il est temps de se replonger dans l’aventure pour témoigner, analyser et se servir de ce retour d’expériences qui en plus d’être utile pour les prochains évènements, sera un récit sympa à relire dans le futur qui sait !

Malgré le non récit de mon Grand Raid 2017 (je le finirai bien un de ces 4), j’ai quand même réussi à tirer certaines leçons essentielles avec des points positifs et négatifs à améliorer. On apprend beaucoup plus de ses erreurs. Le GRR était le premier Ultra Trail XXL donc une grosse part d’inconnue au niveau psychologique et physique. Même si les conseils avisés de l’ami Samuel ou de mon frère était là pour me donner les bases, il faut néanmoins se confronter par soi-même à ce genre d’aventure.

Pour faire un retour rapide, pas mal de stress et de pression sur cette diagonale des fous qui reste néanmoins une superbe expérience avec son lot de désarroi et de bonheur. Au final pour une première, j’ai quand même fini en un peu plus de 41h, plus que mes espérances affichées mais ça apprend du premier coup à rester humble.

Un mal de ventre jusqu’à « mare à boue », des temps de pauses longuets (4h30 en tout) avec 2 siestes de 20mn sur le parcours. Une cheville en vrac à cause d’une grosse inflammation aux releveurs droits à partir du 100 km (trop serré mes pompes), une montée du Taïbit chaotique suite à un gros coup de chaud, pas très bien mangé sur le parcours (tombé à 74kg à l’arrivée 78-79kg au départ) une 2ème partie de parcours difficile où tu limites la casse car assez atteint psychologiquement.

Bref, depuis la reprise en décembre janvier l’objectif de cette année était l’Ultra Tour des 4 massifs avec 2 courses longues de prépa : l’ultra tour du Haut Giffre (87 km 6400D+) mi-juin et le trail de l’étendard (avec ses 65 km et 3700D+) 3 semaines et demi avant. Un hiver cool et un printemps aussi cool avec 2 petites «coursettes » dans le coin pour se mettre un peu de rythme.

Le tour du Haut Giffre a été très dur pour moi avec chute et crampes dans les montées… par contre l’Etendard une superbe course à une bonne allure tout le long avec à l’arrivée une 6ème place. Pas du tout mal aux jambes après la course et pas cramé du tout.

Un peu quand lorsque je faisais du vélo, je sais que je n’ai pas trop un gabarit de grimpeur avec mon mètre 94 et mes 80kg. Du coup cette année je me suis décidé à travailler une vitesse de croisière un peu plus élevée et le travail des descentes. J’ai finalement fait très peu de VMA (une fois je crois à Bachelard) juste du fractionné sur terrain vallonné. En regardant mes stats j’ai finalement fait moins de kil et en rapport un peu plus de dénivelé. Moins de sorties longues mais j’ai travaillé en qualitatif avec des répétitions de côtes, montées descentes, travail en endurance active quelque soit le profil … Le dernier point important a été l’intégration de séances de Bodyweight pour un renforcement général harmonisé.

Pour l’UT4M je ne me suis pas pris la tête, en plus je connais 80% du parcours étant Grenoblois, juste une inconnue du refuge de la Pra – Freydières – Saint Nazaire et si aussi la descente sur Saint Paul de Varces pour rejoindre vif.

Après ma dernière course et avant l’Ut4M c’était les vacances au Portugal avec décompression et juste le maintien de sorties régulières un peu rythmée pas très longues (mais parfois sous la canicule).

A peine rentrée de vacances, reprise du boulot donc pas vraiment le temps de me plonger dans la course. Je me suis penché sur le roadbook 2 jours avant essayant d’estimer les temps de passage pour l’assistance des parents qui seront présents. Je pars sur 35h pour un temps très optimiste et 40h pour un temps de passage réaliste (ayant mis 41h et quelques pour mon premier/dernier Ultra).

J’ai préparé mes sacs assistance pour vif (très light avec un tee-shirt manche longue, pass montagne), Rioupéroux (changement de tee-shirt, crème, chaussures et nourriture solide) et Saint Nazaire (comme pour Rioupéroux les shoes en moins). Les parents ont toujours de quoi grignoter et boire sucré, salé et coca. Prévu cette fois ci des sandwichs salés et des gels de caféine pour avant et pendant la nuit.

Moi qui d’habitude cours toujours au cardio, je me suis dis 3 jours avant que je le laisserai à la maison et j’essayerai de me concentrer sur mes sensations et faire cet ultra au feeling. En plus comme celui-ci déconne ça allait plus me gêner qu’autre chose ou ne pas me servir au final.

 

Le Départ à Seyssins

« Comme un air encore de vacances… »

Changement par rapport à l’an dernier. Le cadre est idéal dans le parc F. Miterrand. Grosse pelouse où l’on peut attendre dans de bonnes conditions avec la famille. En plus c’est cool il restait un tapis de plage dans la voiture… on se serait presque cru encore en vacances. Je me fait 2, 3 allers retours car l’orga à mis à disposition café et gâteaux histoire de patienter … comme cela je ne risque pas d’hypo !

A 40 mn du début de l’aventure le speaker nous appelle pour aller dans le SAS de départ avec un contrôle du matos obligatoire. Déjà effectué la veille … mais rebelote. L’UT4M ne rigole pas avec le matos obligatoire. On est un peu en mode tortue ninja mais c’est pour tout le monde pareil et on ne sait jamais donc … 😀

En tout cas c’est moins la cohue qu’au départ du Grand Raid 500 participants ça se bouscule moins. Je me place dans les 50ème sur la ligne de départ et serein.

A 16h05 le départ est donné, allez hop c’est parti pour 170 km 11000 D+ et de D- sur 4 massifs. On se fait une petite boucle dans le parc histoire de « frimer » un peu au milieu des familles et des encouragements… c’est cool de partir !

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Assez rapidement je me remémore un peu les principes de bases que je me suis fixés : ne pas s’emballer, ne pas partir vite, les minutes gagnées au début se transforment en heure perdues si on se crame, on boit bien ses 600ml / heure et on mange bien toutes les heures également.

Devant certains partent vite, je prends mon rythme je laisse passer quelques coureurs mais je reste dans les 50ème, ce qui à l’air de correspondre à mon allure.

La montée est régulière et tranquille pour monter à Saint Nizier, on traverse 2, 3 fois le route histoire de faire coucou aux parents. Je garde les bâtons dans le sac sur ces premiers 10 kil. Arrive déjà la montée du tremplin, c’est vrai que je ne la connais pas celle là car je prends toujours du côté du sentier écologique pour monter au Moucherotte. D’ailleurs certains coureur se sont plantés et déboulent du sentier écologique 😀 ; Allez c’est le moment de tester les bâtons. Une montée au rythme avec une foule déchainée et en haut le premier ravito (ah ok je pensais que c’était à saint Nizier mais c’est au tremplin) allez hop on recharge en eau on mange 2 bouts de banane et on repart.

 

Saint Nizier 13,2 km – 1h35

« On sort petit à petit de sa bulle »

(Dans les 50ème ayant rajouté du temps à tout le monde les classements ne sont pas fiables jusqu’à Riouperoux sur le site UT4M. Les conditions ayant changé nous n’avons pas fait Chamechaude alors que les 10 premiers si. Ils nous ont rajouté du coup 36mn de pénalité, pour les points ITRA je suppose… donc ça sera approximatif jusqu’à Rioupéroux).

On fini la dernière partie plus raide sur le Moucherotte, je monte sur un rythme tranquille en prenant le temps de discuter avec Paul (T-mobile Style) et un autre coureur qui avait mis 35h l’an dernier et fini 15ème. Il me dit qu’il est dans ses temps et qu’il espère faire la même chose. Bon ben si je le vois encore dans 100 bornes je serais peut être sur mon estimation optimiste alors !

Sur la descente qui rejoint Lans en Vercors je déroule un peu. L’idée est de ne pas se ruiner les muscles en descente mais de ne pas perdre de temps voir en gagner tout en restant souple et laissant jouer la gravité sans s’emballer.

 

Lans en Vercors – 21,2 km – 2h51 (entre 45 et 50ème)

« Le mur du 30ème kilomètre ! Déjà ? »

J’arrive avec mes 2 comparses au ravito, 3mn de pause on recharge et on repart… j’apprend quand même en papotant que lorsqu’il a mis 35h et 15ème l’an dernier, l’UT4M avait bifurqué directement après croix de Chamrousse sur Freydières évitant refuge de la Pra et Grand Colon et n’était pas monté à Chamechaude …ah ouais ?? .. Bon ben on verra alors !

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Sur la montée du Pic Saint Michel une petite monotonie commence à arriver, la descente arrive rapidement sur Saint Paul de Varces et la nuit commence à tomber. Personne ne s’arrête pour sortir la frontale et on arrive au ravito en mode lynx et franchement en ne voyant pas grand chose !!

A Saint Paul de Varces (km 31), petit ravito ou je m’arrête 5 mn histoire de bien remplir les flask et de mettre ma frontale. Je repars pas super en forme … le mur des 30 bornes ?… merde j’espère que je ne suis pas parti trop vite sans m’en rendre compte.

Je grimpe la montée au train en économisant ma frontale … en mode 10% dans les montées et 20% dans les descentes. La rallonge Ferei, n’est pas terrible quand on tourne la tête, la connexion déconne et la lampe s’éteint. Ça m’avait fait ça au Grand Raid et en plus je mettais le faisceau au taquet ce qui m’avait value la 2ème nuit une montée du Maïdo sans frontal, à la lumière du téléphone presque déchargée et à suivre des coureurs. Cette fois-ci pas de connerie on économise l’énergie !

 

Vif – 39,9km – 5h43 (toujours entre 45 et 50ème)

« Vercors 1 – Tibo 0 »

Bon j’arrive pas terrible terrible sur la première base de vie, j’ai l’impression d’avoir cramé pas mal de cartouches et d’avoir un peu de mal à récupérer sur le plat et en descente. Aie aie aie :-/

Les parents sont là je leur dit me de booster pour repartir vite. Je prends le temps de bien me changer car on va attaquer l’Oisans et monter en altitude. Je prends des bananes, pâtes de fruits et je recharge en eau gazeuse et eau plate. Je décide de partir pour ne pas perdre de temps en mangeant mon sandwich en avançant. Coût total de l’opération pour le manger 20mn… oulala j’alterne machouille et gorgée d’eau pour le faire glisser … déjà du mal à gobber la nourriture. Bon il faut en être honnête j’ai pas trop la frite sur cette partie… allez c’est pas grave on prend un rythme un peu moins soutenue et on essaye de récupérer. Je connais bien la portion j’ai fait l’UT4M Oisans l’an dernier avec une belle 3ème place… ça va moins vite cette année mais ça c’était prévisible 😀

 

Laffrey – 53,5km – 8h21 (dans les 40ème)

« Soigner le mal par le mal »

Le constat depuis Saint Paul de Varces jusqu’à maintenant : coup de moins bien. Allez je décide de prendre de la soupe de vermicelles, de m’assoir 5 mn, je recharge en jus de pomme + eau et en eau gazeuse. Je vois également Luca PAPI en plein ravito… je lui glisse ça y’es tu commences ta remontée, il me répond avec un grand sourire. Je repars direction la Morte. Ça continue à grimper sur une pente régulière, je me retourne de temps en temps et je vois quelques lumières qui naviguent dans le noir. Cette partie n’est pas la plus excitante et je me dis que de la faire de nuit n’est pas si grave….On contourne l’Alpe du Grand Serre, un des KV le plus réputé et ce n’est pas plus mal de la contourner et de ne pas aller voir la haut si j’y suis…pas !

A peine sortie de mes pensées je vois une lumière jaune se rapprocher de plus en plus et assez rapidement. Oula je dors ? Je suis collé ou bien ? A ce moment là je vois débarouler Luca Papi, 2, 3  mots échangés et je me dis que je vais tenter de prendre son rythme. On commence à engager la conversation, je lui dis que ce n’est pas la grosse forme depuis quelques heures. Sa réponse : « il faut que tu accélères et fasse monter le cardio, ça va te réveiller, vas y essaye » c’est l’heure ou si tu ralenties ton rythme tu t’endors progressivement et c’est de plus en plus dur…. Hum ? Quoi accélérer ?? Allez pourquoi pas, il a une solide expérience et tant qu’à faire autant tester des choses, au pire je le laisse filer si je sens que ça va trop vite….Quelques minutes après je sens qu’on est dans un bon rythme et en fait il a raison, les sensations reviennent, Luca me dit « il faut courir sur les parties en faux plats c’est là qu’on grappille » … « beaucoup de gens ne courent pas dans l’Oisans et c’est là qu’on rattrape du temps » ! Notre vitesse ascensionnelle est à 1200 m/h me balance Luca. Il relance et je le suis aisément reprenant même du monde devant. On cours dès qu’on peut et on se relais. On gobe littéralement les petites montagnes russes et les lumières de la morte arrivent finalement très vite.

 

La Morte – 65,2 km – 10h17 (39ème)

« Requinqué et concentré seul au cœur de la nuit »

On se retrouve à une petite dizaine de coureur au ravito… on pose les bâtons à l’entrée dans un truc à parapluie (faudra faire gaffe de pas prendre les mauvais en partant… enfin la mauvaise taille car il n’y a que des Leki !!!). Je reprends direct de la soupe de vermicelle et rempli les gourdes. Les coureurs trainent un peu alors je décide de repartir, je me dis que partir avec 2,3 mn d’avance sur le pas de la vache c’est pas si mal comme ça ils reviendront sur moi un peu plus tard. Je fais un signe à Luca en lui disant que je prends un peu d’avance. Après 2,3 blagues aux bénévoles, c’est reparti pour un gros morceau !

Je reste sur mon rythme et les sensations sont bonnes. J’attaque le « pas de la vache » et je regarde ces quelques lumières hautes dans le ciel et ces quelques loupiotes en bas dans le noir … La montée se fait bien c’est la 3ème fois que je passe ici… Il fait nuit noire. Plus on grimpe et plus on sent le froid et le vent. Une centaine de mètres avant le sommet malgré la nuit intense et noir, se dessine une mer de nuage blanche et on devine toutes les montagnes des alentours. En haut du pas de la vache il y a un bénévole, un guerrier plutôt car vu le climat et la gelée qu’on devine sur les herbes par terre il en faut également du courage.

Allez c’est parti pour une descente technique vers le lac de Poursollet. Bien content d’avoir réussi à avaler cette portion dans de bonnes conditions et puis finalement personne ne m’est encore revenu dessus. En redescendant on commence à arriver dans ce qu’on peut vraiment appeler une purée de poids… brouillard à couper au couteau sur un passage technique ou le faisceau de la frontale dessert autant qu’il nous sert… bref on voit que dale ! Heureusement c’est bien balisé mais même avec ça il faut être vigilant car on peut s’égarer du chemin (enfin c’est une façon de parler car il n’y a pas vraiment de chemin). Personne devant personne derrière…tout seul dans le froid et la brume au bout de 12h de course on se sent vraiment tout petit et finalement fragile.

Je ne me désunis pas en essayant de perdre le moins de temps possible car on perd pas mal de temps avec ces conditions. Je reviens sur un trailer que je sens un peu désemparé râlant sur la non visibilité. Je le vois souvent s’éloigner du tracé… je passe rapidement devant et je lui demande si ça va ? Il bougonne un peu… je lui dis de s’accrocher derrière car à 2 ça sera plus sur ! Mais rapidement je vois le faisceau se dissiper et en plus on attaque une partie plus raide et devenue très glissante. Le temps est long mais je reste concentré, c’est galère pour tout le monde de toute façon.

 

Lac de Poursollet – 76,2 km – 13h01 (34ème)

« La douceur de l’aurore »

Le lac de Poursollet arrive, je n’utiliserais pas le mot se dessine car c’est trop brumeux. Ouf ça fait du bien après plus de 2h30 de voir un peu de chaleur humaine… On ne change pas une technique qui marche, je me pose sur un banc me réchauffant avec ma petite soupe de vermicelle. On lutte toujours à manger les pâtes sur la fin qui restent au fond de la tasse. Une bénévole demande qui veut du café… ça me fait sortir un peu de mon coin et je cri mwaoa… fausse joie il n’y en a plus… allez c’est pas grave un peu de théine fera l’affaire.

Direction la montée du lac Fourchu … je sais qu’il y en a pour une grosse demi heure et après on commencera à se rapprocher de la terrible descente de Rioupéroux. En haut de la montée je vois la lumière de Luca revenir rapidement sur moi… il a remis le turbo … en haut le jour commence à se lever sur des petits singles au milieu de cette steppe alpine… J’essaye de rester dans le sillage de Luca mais il va vite et est fluide. Je perds un peu de temps mais je le garde en ligne de mire.

 

Chalet de la Barrière – 82,8 km – 14h33 (32ème)

« Cassage de fibres musculaires »

Allez cet endroit marque le départ d’une bonne session de cassage de fibres musculaires… j’arrive au chekpoint et je décide d’enchainer, la base de vie est juste en bas, juste à 1400 m en dessous :-D. Luca disparaît volant dans la descente… je suis un coureur qui descend à une bonne allure. Sur cette descente il faut essayer de descendre sans y laisser trop de plumes. La pente est raide, il y a des racines … la première partie se passe bien mais au bout de 30 mn non stop dans des pentes à 30% ça commence à piquer quand même. Je n’essaye de ne pas trop y penser, j’essaye une technique chinoise en essayant de ne pas penser ni au temps et à la douleur et puis de me dire « on arrivera en bas quand on arrivera » sans regarder la montre.

L’an dernier j’en avais vraiment chié mais à la fin c’était la délivrance et le podium… là finalement c’est dur mais soutenable, la tête joue beaucoup et puis ce n’est pas le moment de se relâcher car on arrive tout juste à la moitié du parcours.

 

Riouperoux – 88,2 km – 15h21 (31ème)

« Oisans 1 – Tibo 3 »

La base de vie est en face à la Salignière juste avant le début de la montée du KV. Quel contraste avec ces dernières heures avec une foule de coureurs qui vont s’élancer pour le challenge et pour le 40 de Belledonne… beaucoup d’encouragements qui hérissent les poils et réchauffent le moral. Je me dis que je dois avoir une tête de déterré en croisant le regard des gens, mais c’est cool la moitié de faite et je me sens mieux maintenant qu’en arrivant à la première base de vie… comme quoi en Ultra on ne prédit de rien !

A Rioupéroux, je retrouve l’assistance des parents et je fais un point à mi parcours. Premier constat : j’ai quand même 1h30 d’avance sur mon meilleur temps estimé à ce moment là et c’est bon pour le moral ! (Les parents ont dû se lever un peu plus tôt du coup mais c’est pour la bonne cause 😉 A Rioupéroux c’est changement de maillot, nettoyage du visage et des jambes, soupes de vermicelles, recharge de la montre et petite pause allongée de 5 mn sur un banc car j’ai un petit mal au dos quand même. Je change de chaussures, chaussettes également pour repartir « frais ». En temps normal cela ne fait pas une gosse différence mais au bout d’une quinzaine d’heures de course et d’une nuit dehors sans dormir toutes les petites attentions et ces petits détails sont démultipliés et exponentiels. C’est même assez fou, cette sensibilité accrue. Mais attention cela marche aussi dans le sens inverse. De taper une petite racine ou un petit caillou anodin peut se révéler comme une épreuve pouvant durer de longues minutes et cassant le moral. Un peu comme si notre moral quelque part enfoui dans notre cerveau était un véritable punchy ball encaissant tous ces aléas.

Au bout de 5 mn mon père vient me dire « ça yé ça fait 5 mn » … je me dis : «  hein déjà ? » j’ai l’impression de m’être allongé il y a 30 sec. On en reparlera plus tard aussi mais ça aussi c’est un phénomène à ne pas oublier : l’espace temps avec la fatigue physique et psychique est complètement différent. Les secondes paraissent des minutes, les minutes se transforment en heures. Souvent on a l’impression d’avoir passé 3,4 mn au ravito, tu te dis même, avec une certaine fierté, que tu as fait un ravito express comme dans une GP de formule 1, et bien non après coup tu regardes et t’as airé quasi 8,10 mn pour choper un peu d’eau et tenter de manger 3 bouts de banane !!!!

Allez hop je décide de me bouger, car d’une part ça fait 25mn que je suis arrivée à la base de vie et aussi pour essayer de partir avant le départ des courses du jour pour attaquer la terrible montée de Rioupéroux un peu dans ma bulle et de reprendre mon rythme sans l’euphorie des départs et des coureurs.

Je suis acclamé au départ, car tous les spectateurs attendant le départ des courses, voient un dossard rouge s’élancer sur le KV et m’encouragent… c’est cool.

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Bon ce KV je le connais bien je me le suis enchainé 2,3 fois ces 3 derniers mois. Je me dis que je vais le monter à mon rythme car après on attaque Belledonne et sa technicité. Pour le coup la montée de Rioupéroux est raide 3,4 km à plus de 30% mais pas trop technique et les bâtons aident vraiment dans ce type de côte.

Au bout de 10 mn de grimpette j’entends le coup de départ des challengers … bon je risque de prendre le vent dans quelques minutes. Au 2/3 du parcours en contrebas je vois 2 challengers qui montent vraiment très vite. Là tu te dis j’aimerais bien avoir leur jambes à ce moment là… non, non c’est pas le moment de penser à des conneries car y’en a un paquet qui vont te doubler à partir de maintenant. A peine sortie de mes songes que je vois Florentin qui mène la danse et qui m’encourage car on se croise de temps en temps dans la montagne ou sur des courses. Jusqu’à la fin de la montée une bonne cinquantaine de coureurs (peut être plus) me double toujours en m’encourageant.

Finalement j’aurais mis un peu moins d’1h40 pour monter le KV et arrivée sur le plateau de l’Arselle au prochain check point… donc la montée s’est bien passée.

 

Arselle – 92,3 km – 17h31 – 24ème

« En Belledonne… on fait comme on peut »

Petit ravito express sur le plateau de l’Arselle avec la satisfaction d’avoir passé ce KV finalement dans de bonnes conditions. En fait je me suis mis en mode pilotage automatique sans trop réfléchir, sans regarder la montre, connaissant bien le chemin et ça la fait ! Je recharge en eau et coca et je vois Luca qui prend souvent le temps au Ravito ! Un petit coucou et je lui dit à tout à l’heure car la connaissant il risque de revenir … en fait non Luca arrêtera à la fin de Belledonne pas encore remis de son coup de moins bien chopé après la Transka à la Guadeloupe.

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En 3 mn je repars et je sais que la portion moins dur sur le papier est néanmoins redoutable. Le massif de Belledonne est très technique et on progresse difficilement. En repartant de l’Arselle je vois une flopée de coureur avec des dossards orange. Je me dis « tiens Chamrousse a organisé une course en même temps que l’UT4M » ou bien « c’est un groupe d’un stage » etc…. je vais mettre quasiment plus de 30 mn à réaliser qu’il s’agit en fait des coureurs du master. Quand je réalise cela je me dis que la lucidité n’est pas à 100% à ce stade de la course :-D. Du coup je devrais surement croiser Cathy qui s’est engagée sur le 100 kil sur le massif de Belledonne. Jusqu’à la Croix je fais le yoyo derrière les Masters qui vont un poil plus vite que moi dans les montées mais qui par contre me ralentissent dans les descentes ! En plus, doubler dans Belledonne demande du jus qu’on préfère conserver précieusement. Donc tant pis je prends mon mal en patience en n’étant pas vraiment dans mon allure.

 

Croix de Chamrousse – 97,5km – 18h48 – 24ème

« Belledonne chahute avec nous »

Arrivé à la croix c’est un peu le bordel … beaucoup de participants un épais brouillard, il fait très froid et le ravito est sous tente où tout le monde piétine pour choper un fond de soupe et d’eau. Je décide de me changer et tout le monde me bouscule, faisant tomber sacs, bâtons et affaires… pas très cool comme ambiance et à ce moment là tu as envie de balancer un «faites gaffes un peu » mais pas vraiment la force non plus. Après tout c’est vrai j’ai actuellement l’équivalent de ce qu’ils auront à la fin de leur course !!! Donc un peu de respect 😀 !

Je galère à mettre mes gants, à sortir mes affaires mon imper etc… il fait froid et les mains sont glacées en plus de la fatigue.

L’UT4M est une belle course mais l’enchevêtrement des coureurs sur le parcours c’est pas top top notamment au bout de 100 kil… on verra plus tard que c’est pas fini non plus !

Je repars direction le refuge de la Pra toujours sur un rythme décousu et en discutant quand même avec 2, 3 gars du Challenge qui ont l’air un peu impressionné de voir des gars du Xtrem à leur même allure. Le fait de discuter fait passer le temps un poil plus vite sur cette partie qui semble longue vis à vis des quelques kilomètres à parcourir.

 

Refuge de la Pra – 103,6km – 20h27 – 25ème

« Prendre son mal en patience et avancer »

Qu’est ce que je vous disais à propos de Belledonne, 11km 1000 D+ depuis l’Arselle et quasi 3h de course … ça piétine ça piétine !

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Alors la pause express moins d’une minute pour une fois le ravitaillement se fait à l’envers 😉 il fait froid donc pas besoin de reprendre beaucoup de boisson j’en ai encore assez. Allez c’est parti en direction du Grand Colon et après ça sera la longue descente jusqu’à Freydières dans un premier temps puis Saint Nazaire dans un second temps !

La montée se fait tranquille je reste dans les baskets des masters, certains appellent leur famille d’autres commencent à râler, certains se mettent sur le côté, d’autres encore manquent de nous balancer des cailloux sur la tête en tentant de doubler dans la montée. C’est vrai que c’est chiant d’être avec du people mais par contre ça commence à devenir rigolo et je ne suis pas le seul à galérer… du coup c’est un peu vicelard mais ça aide à aller mieux (de rire pas de voir les autres galérer 😉

Nous voilà arrivés au sommet du grand Colon point culminant de cette UT4M Xtrem (2390m). Maintenant on va redescendre jusqu’à Villard Bonnot qui est à 200m d’altitude… ça fait une bonne descente et plus de 2000m D- d’affilé ce n’est pas anodin je peux vous le garantir. Déjà quand je fais un Moucherotte au printemps la descente peut piquer les cuisses sur la fin, mais là avec 106 km dans les pâtes ça va être sympa.

Sur la descente technique du début je décide de suivre des coureurs qui vont vites. Au détour d’un virage je vois Paul qui revient sur moi. Il a troqué sa belle tenue rose des T-Mobile contre des vêtements plus chauds. On fait la descente ensemble et petit à petit la température remonte. On papote pas mal sur nos états de course sur le dernier massif et demi. On arrive sur de la piste forestière puis sur la route. Freydières n’est plus très loin. Je commence à sentir mes releveurs côté droit et une douleur sous la plante du pied. Ah le bitume ça tape on essaye de garder une foulée sans trop de choc mais c’est pas évident. Il commence à faire chaud et je ne veux pas m’arrêter avant Freydières où les parents seront là. Du coup je remonte un peu les manches, je retrousse le bonnet et tente d’ouvrir la veste qui se coince toujours dans la fermeture éclair. A ce moment là, tu sais que le style n’a vraiment pas d’importance, on recherche le confort quel qu’en soit le prix. L’esthétique devient secondaire !!!

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Freydières – 113,8km – 22h21 – 21ème

« le D- compte tout autant que le D+ »

Arrivée à Freydières les parents sont là. Je décide de faire ma traditionnelle soupe de vermicelles d’enlever mes vêtements chauds et de repartir sans trop tarder (7mn quand même). Je veux à tout prix en finir avec ce 3ème massif.

La descente continue avec son lot de pentes raides qui attaquent bien les cuisses. Certaines parties sont toutes droites dans la pente et à ces moments tu jures dans ta tête. Mes releveurs me font mal à droite, j’ai encore dû comme au Grand Raid trop serré ma chaussure à droite. En même temps je me dis que j’ai lavé mes chaussures avant la course pour qu’elles soient belles (esthétisme dont tu te passes allègrement à ce stade là comme mentionné ci-dessus) et qu’elles ont dû rétrécir un peu. Assez lucide pour te dire qu’il faut les délasser un peu, mais grosse flemme de le faire… on verra à Saint Nazaire.

Arrivée à Villard Bonnot, fin de la descente… yeah ! Je recommence à avoir envie de sucré… incroyable, je me jette sur les bonbons et je mange mon snicker …et ça repart pour une partie tout plate de 6,5 km pour rejoindre Saint Nazaire les Eymes. Allez hop 40 mn pour tester ton degré de lassitude. A ce moment là je me dis que de toute façon : « les montées c’est dures », « les descentes ça explosent les cuisses et les releveurs » et « le plat c’est chiant »… en d’autres termes si tu prends le côté négatif des choses ben c’est la merde encore pendant quasi 10h :-D.

Je réussi à non pas apprécier la chose non plus mais à me déconnecter et à me satisfaire de ce que je fais depuis le début. Je conserve un bon rythme, je suis en avance sur mon timing, la course est dure pour tout le monde et je suis entre 20 et 30 (je sais pas exactement à ce moment là). Plus que la place qui dépend du plateau c’est mon temps qui me réconforte. J’essaye vraiment de positiver à ce moment là et ça fonctionne plutôt pas mal.

 

Saint Nazaire les Eymes – 127,3 km – 24h16 – 19ème

« On garde le rythme sur ce dernier Kv »

C’est avec satisfaction que j’arrive à Saint Nazaire avec un public toujours bien présent. Je vais me faire une bonne pause pour repartir dans les meilleures conditions pour cette dernière partie.

Je zones un peu au début vers le ravito et je reprends vite mes esprits pour essayer de m’activer un peu. Je retrouve les parents et profite d’un bon massage du père notamment sur les releveurs qui sont bien douloureux. Je me ravitaille bien un red bull et je vérifie que j’ai bien tout pour affronter la dernière partie de cette course. La Chartreuse je connais bien … du moins après le col de la Faïta on va dire que je connais quasiment le moindre cailloux.

Après 25mn de pause je repars juste derrière un groupe de master. Tout le début de la montée je les garde à 100m. ils ont un bon rythme, je fais un petit effort pour revenir dans leurs bâtons et me caler à leur rythme. On rattrape pas mal des gens du master. Ah à ce moment là je descends et monte quasi ou plus vite qu’eux 😉

La montée de la Faïta se fait à un rythme qui me va bien la deuxième partie est moins raide et l’idée est de ne pas trop perdre de vitesse. Un des 2 masters qui mène depuis le début commence à craquer et ils décident de s’arrêter. Je continue mon petit bonhomme de chemin remontant les masters qui coincent un peu.

Je commence à apercevoir le sommet et j’arrive à l’Emeindras … ah le dernier gros morceau est passé après il restera que des côtes qui feront moins de 1000 de D+ héhé.

J’avais un peu chaud en bas car parti avec un tee shirt manche longue mais là le temps est frais, doux avec un joli soleil qui est vraiment très agréable. On va arriver au Habert de Chamechaude réputé pour sa folle ambiance.

 

Habert de Chamechaude – 139,3 km – 27h37 – 18ème

« On lâche rien ! »

Allez un gros bol de soupe de vermicelles. Je mange des fruits et je bois du coca. Il faut bien se ravitailler pour la montée.

Au même moment les bénévoles nous informent que les conditions en haut de Chamechaude sont mauvaises, vent et très froid et ils décident de nous éviter la montée. Certains coureurs du master commencent à dire « ah mince » moi j’avoue que gratter 2 kms et 300 D+ en moins ne me gène absolument pas … en plus je la connais bien la montée et la vue et je n’apprécierai pas comme il se doit !

En repartant j’aperçois deux dossards rouge 2 anglais ou hollandais du Xtrem. J’ai vu qu’ils m’ont repéré aussi au dernier ravito et repartent à un bon rythme. Je me dis que je vais les garder pas trop loin de moi et si je peux j’essayerais de revenir sur eux dans les descentes.

Après le « col de porte » la nuit commence à tomber, les 2 de devants s’arrêtent pour sortir leur frontal et j’en profite également pour faire de même. Argh j’ai remis mes affaires n’importe comment à Saint Nazaire et la frontale et les câbles sont entremêlés. Je décide de prendre ma recharge à pile et d’enlever la rallonge en remettant la recharge sur la tête … moins confort mais comme ça j’aurais peut être pas de coupure de jus.

Là j’ai perdu pas mal de temps mais revient petit à petit sur les 2 rouges et au moment de la jonction un des 2 bloque ou casse un de ces bâtons … ils s’arrêtent et je ne les reverrais plus du coup !

Je ne me souvenais plus que pour arriver au foyer du ski de fond c’était aussi long. On passe un peu dans la ville mais on ressort puis ça remonte puis ça descend… je n’arrive même pas à savoir où je suis exactement au Sappey. Avec la tombée de la nuit, le manque de lucidité se fait plus sentir et il faut se reconcentrer.

 

Le Sappey en Chartreuse – 151,7 km – 29h15 – 14ème

« Positiver, tout optimiser et rester concentrer »

J’arrive au Sappey avec pas mal de monde et les parents qui sont « toujours » là. Je recharge rapidement en eau mange des brochettes de bonbons (et oui faut se faire plaisir avant tout) et je repars en moins de 3 mn. J’ai la lucidité de ne pas trainer donc je le fais. Je sais qu’il reste juste 2 petits coups de cul et après c’est surtout de la descente jusqu’à Grenoble. Je me projette la dernière partie du parcours avec ses difficultés mais la fin se rapproche petit à petit.

Avant d’attaquer la montée du Saint Eynard je vois un coureur qui revient sur moi avec 2 gros bouts de bois, une casquette verte et un dossard rouge. « Hey salut », tiens voilà un copain, on papote ensemble et rapidement on se présente. Alexandre effectue son 2ème ultra trail XXL. « Ah ouais moi aussi » …. Je lui dis que mon premier c’était en octobre dernier à la Réunion … ah ouuii ? Lui aussi… ça se passe comme ça en ultra trail, parfois au bout de 30h de course tu tombes sur un mec qui a fait les mêmes choses que toi, comme ça et c’est spontanée … bref on va se taper les dernières bornes ensemble. Il me dit qu’il ne voulait pas prendre de bâtons que « bâtonner » c’est triché mais que finalement il a abdiqué avec ces 2 gros morceaux de bois. Certains coureurs du master le chambre un peu mais on se soutient mutuellement côte à côté, lui plus efficace dans les montées et moi dans les descentes.

A ce stade d’un Ultra, on ne se ment plus et on en a pas besoin, on le sent, tout se voit, on est en mode cramé mais une force qui vient d’on ne sait où nous aide à en finir et on ne lâche rien. Je lui fais une petite rétrospective de la fin du parcours que je connais par cœur.

On attaque la descente du Saint Eynard à fond les ballons … non c’est pas vrai … on descend exactement comme il ne le faut pas ; le buste en arrière, on talonne, les jambes bien raides marchant sur des braises … un peu comme les 2 bouts de bois de « casquette verte ».

Et pour couronner tout ça, un peu comme lors de la traversée de Belledonne on entend crié de l’arrière « à gauche » … une fois 2 fois puis ça ne s’arrête plus. Des coureurs qui descendent eux à fond, nous forçant à dévier de notre trajectoire qui était le seul réconfort à ce stade de cet ultra, pour minimiser les secousses et les chocs qui se répercutent dans l’ensemble de ton corps. Qui sont ces coureurs qui descendent à fond et nombreux à plus de 22h ???

Olalala oui j’ai entendu parlé d’une course nocturne cette année … bon ben d‘accord ça va être encore un défilé. Alors vraiment rien contre ces coureurs que l’on envie par autant de fraicheur et qui nous encouragent tous un par un… mais franchement on se serait bien passé de tout ça ! Encore un point négatif pour l’orga. C’est sur on ne joue pas la gagne mais c’est psychologiquement dur !

 

Col de Vence – 158,7km – 30h46 – 13ème

« J’hallucine de tout ce chemin parcouru»

Bon on ne va pas se lamenter car on arrive déjà au Col de Vence, dernier ravito avant l’arrivée à Grenoble. Les parents toujours pleins d’encouragements. Un regard vers Alexandre, allez on repart, on ne traine pas !

LA dernière remontée sur la piste qui mène au Rachais se fait un peu en mode zombie… de très légère hallucination avec la fatigue et le faisceau de la frontale. Je me cale dans le rythme d’Alexandre… allez la fin est proche.

On bascule enfin en haut du Rachais et on voit Grenoble, ses lumières nichées au milieu de ses montagnes, ses 4 massifs. Une mini rétrospective de l’aventure commence doucement à se mettre en place, tu te dis ‘tain j’étais là bas puis là… waouh c’est pas si mal quand même… je regarde un peu ma montre pour une fois l’allure n’est pas top 8’00 min au kil (ouch 2 fois plus lent que d’habitude) mais 31h et quelques de course … allez soyons honnête, c’est bien mieux que tout ce que j’aurais pu espérer … un top 15 en 32h pour quasi 170 kil et 11000 de D+. Là, je suis heureux et fier de cet ultra, le 2ème et à la maison.

Je sais qu’Alexandre me parlait un peu mais j’étais dans mes pensées et je ne répondais pas tout le temps … la fatigue, les douleurs, les pensées m’ont fait perdre un peu mon civisme sur la fin 😀

Nous voilà dans les rues de Grenoble pour un baroud d’honneur (un peu long mais c’est ainsi) je crois que j’avais le sourire gravé sur le visage. On passe devant les bars enivrés et les boites de nuits avec des gens bien éméchés ne marchant plus très droit… tient en fait, un peu comme nous ! Un petit clin d’œil aussi en passant vers minuit devant l’Arkange … y’a 5 ans j’aurais bien pu m’y croiser… et je me dis qu’il y a des petites comparaisons assez personnelles mais : « il y a du chemin parcouru » !

Toujours côte à côte nous arrivons enfin au bout de l’aventure, une petite acclamation par les accompagnateurs. On se présente devant le dernier pointage … allez honneur à la jeunesse 😉 une belle 13ème place ex-aquo… on nous fait signe de courir vers l’arche, on s’élance comme un premier kilomètre les bras en l’air et en criant … mais pas la foule en délire que nous attendions… l’arche dans le noir, le speaker parti on ne sait où et les gens endormis… bon ben ça sera pour une prochaine fois l’arrivée en fanfare !

 

Grenoble – 169,2km – 32h19 – 13ème Ex-aequo –       11000 D+ D-

« L’alchimie des sentiments »

« Well done dude » un check vers Alexandre qui s’allume une clope à l’arrivée et qui me lance un « bon ben à dans 2 ans dans le sas élite de l’UTMB » heu oui enfin à bientôt surement. Pas de médaille mais un lot d’un sponsor un peu court pour mes bras !

Voilà c’est fait, Finishier… Finisher ? Je me dis que c’était dans mes cordes depuis le Grand Raid. On peut toujours finir (sauf gros problème) ce que l’on commence si on en a la volonté. Mais après c’est comment le faire ? Dans quel état ? Comment vit on l’aventure ? Surtout par rapport à l’idée que l’on s’est faite de cette aventure ? De nature optimiste je vois toujours de belles choses, j’espère de belles choses ! Mais lorsque la réalité dépasse ses espérances… on s’évade dans ce moment magique, on se sent léger, heureux, malgré une réalité physique toute autre. Les 170 kms ne nous paraissent pas si impossible et interminable. On se surprend à se dire « c’est déjà fini » ? Je sens que la fatigue, physique et psychique, reprend vite le dessus et que mes yeux se ferment ! C’est normal, mais certaines choses vont rester gravées au plus profond de mes synapses ! On est capable d’être connecté à 200% et de tout sentir et ressentir. Mais aussi de se déconnecter pour oublier, ne pas sentir et tenter d’accélérer le temps. Beaucoup de contradictions, de fusions, de haut et de bas mais qui génèrent une alchimie de sentiments difficilement palpable que j’ai encore envie de découvrir. De belles expériences, je l’espère, sont encore à venir !

 

Un grand merci à Khaldia, Malya, Annie et Michel

 

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Diagonale des Fous millésime 2021

Grand Raid Réunion

Mafate vue des remparts

L’attente et la mise en bouche …

Depuis la Redoute en 2017, il y a toujours eu dans un coin de ma tête l’envie de revenir sur cette Diagonale des fous. Elle attire par son éloignement et captive par son exotisme. En 2017 c’était mon premier Ultra Trail XXL, finit péniblement sur une patte. Il était impossible de laisser cette note inscrite sur ce bout de chemin.

La Diagonale c’est un peu comme ce bonbon piment… qui devrait être sucré mais qui est salé, à destination des enfants mais plutôt interdit au moins de 18 ans, à t’en faire saliver mais qui en vérité te fait transpirer.

En 2020 il y a eu ce faux départ qui au final m’aura permis d’avoir une année supplémentaire pour mieux apprécier cette aventure.

Sur le papier la Diagonale des Fous c’est 160 km et 9500 D+, un ultra exigeant mais, qui sur sa cotation, ne fait pas figure d’épouvantail dans le monde de l’Ultra … et pourtant il faut s’en méfier !

Un départ tardif qui implique pour quasiment tous les participants 2 nuits dehors minimums, de passer de 30 degrés à 5 degrés puis remonter à plus de 40 dans la même journée.

Et enfin, la technicité du parcours qui ne donne aucun répit jusqu’au pont à la fin de la descente du Colorado, à 1km du stade de la Redoute. Des cailloux (rochers) péï en veux-tu en voilà, distribués par ces chers pitons parfois encore en éruption.

Pour ce millésime 2021 « la Diag » ne sera qu’une partie des vacances que l’on attend depuis 2 ans. J’en profite pour remercier et saluer l’équipe de bénévoles et salariés du Grand Raid avec leur nouveau président Pierre MAUNIER, sans qui cette édition n’aurait pas pu exister.

Pour tous ceux qui sont nostalgiques ou critiques, sachez que cette édition n’a pas été diminuée, ni en termes d’ambiance, ni au niveau du parcours. Pas de Maïdo pour sortir de Mafate mais 15 km de plus sur des sentiers bien plus techniques et cassants que la descente de Sans Souci. En bonus, la montée de Dos d’Âne fait bien son job également au bout de 120 bornes !

Arrivé sur l’île en 24h, porte à porte avec Malya et Milhan, le trajet a fait office d’un bon petit échauffement 😀 . Khaldia prendra le départ des vacances en même temps que mon départ de Saint Pierre. La famille, ponctuelle est au RDV pour la descente de l’avion. Le temps de déguster un jus de fruit pays, récupérer les présents offerts par l’IRT réunionnais et une petite interview de Réunion 1ère et nous voilà en route pour le lieu de nos vacances.

Les 5 premiers jours auront permis une bonne acclimatation avec le repérage de la fin du parcours. De Deux Bras à la Possession avec la montée de Dos d’Âne et le sentier « accidenté » de Kalla. Le Chemin des Anglais juste en bas de la maison ainsi que la fin de la montée du Colorado. Bref histoire de se rafraichir les méninges car tout le monde sait que nous avons une mémoire sélective et la mienne ne voyait plus du tout la taille et le positionnement des « cailloux » de la même manière.

Ravine Blanche Saint Pierre – 21 octobre 2021 – 21h

Passons du rêve à la réalité des choses … Après quelques bouchons quelques peu gratinés entre Rivière des Galets et Savannah, on arrive tranquillement à Saint Pierre. Cette année, avec le départ par vagues, la pression est moindre. Arriver 2 heures avant le départ de ma vague me semble large… le départ de la Diag c’est un peu comme le départ en vacances et ton avion. 3h tu attends trop, moins de 2h tu as peur de le louper… et bien là c’est pareil… et dans le doute tu préfères poireauter 😉

Comme d’habitude tout le monde cherche à s’économiser et à savoir où les grilles vont s’ouvrir pour nous emmener sur la ligne de départ ! et après un peu moins de 2h d’attente on nous fait avancer sur l’avenue. Du monde partout, une grosse ambiance… ok pas de concert, une arche qui s’écroule 5 mn avant le départ (avec un Ludovic Pommeret déjà en train de lever les bras pour la soutenir), pas de feux d’artifice, mais le principal est là…. Une atmosphère de dingue, 2 ans d’attentes et un départ imminent.

Je dois être en 4 ou 5ème ligne quand le décompte commence. L’excitation est telle que les premiers km dans Saint Pierre s’avalent à vivent allure. Un peu trop vite surement ! au bout de 5 km je vois Antoine Guillon et Cédric Chavet me doubler et là je me dis calme un peu le jeu 😀 . Ces 14 premiers kilomètres se courent tout seul sur les hauteurs de Saint Pierre. Je regarde l’allure que je trouve rapide malgré les bonnes sensations et je m’efforce à temporiser en me rappelant que les secondes gagnées au départ sont des minutes voir des heures à l’arrivée.

On arrive assez rapidement à Domaine à Vidot en 1h15 de course, et en 60ème position, soit 10mn de mieux que mon prévisionnel, basé sur Paul qui avait fait 33h en 2019 et 26mn de moins que ce que j’avais fait en 2017. Bon effectivement on est parti vite car de mémoire c’est un peu le temps que mettent les 10 premiers sur les éditions précédentes.

Ravito express où je prends de l’eau et je file en continuant à bien m’alimenter et m’hydrater. On attaque enfin un petit sentier (sentier fraise) qui nous fait prendre progressivement de l’altitude. Je dois me méfier un peu car étant grand je prends assez facilement des accrocs aux branches qui sont assez basses sur ce sentier. J’essaye de temporiser un peu car je pense que je suis parti un peu trop vite.

Une bonne heure et demi-après j’arrive à Notre Dame de la Paix où je me ravitaille en soupe de vermicelles et je repars 2,3 mn après. Pas besoin de mettre le long ici car les températures sont douces et les manchettes suffiront avec un tour de cou.

La section qui suit est montante dans les pâturages avec de grosses mottes de terre. Pas très technique mais il faut faire gaffe où l’on pose les pieds pour ne pas se faire une cheville. On attaque juste après une partie un peu plus roulante juste avant de remonter sur l’Aire du Nez de Boeuf. A ce moment je commence à sentir une douleur à l’intérieur de la cheville droite et une petite contracture au mollet…. Grrrrrr. Cette cheville je me l’étais foulée correctement en juin avec dans le mois qui suivait les 90 km du Mont Blanc et l’UT4M Challenge. J’ai bien fait les exercices de proprioception et de renforcement mais elle est reste surement fragilisée depuis cet été sachant que j’y ai additionné la préparation de la Diag sans trop la ménager. A cet instant je me dis que si elle pouvait attendre encore 1 jour ou 2 avant de me le faire payer je lui en serais vraiment reconnaissant.

J’arrive au Parking Aire de Nez de Boeuf (38,4km et 2400 D+) en 4h48 et en 44ème position. Une petite baisse de régime sur cette portion qui me confirme que j’aurai dû partir plus prudemment. On attaque la partie un peu plus fraiche qui nous emmène à Mare à Boue. Étant seul j’attends un petit groupe de coureur derrière moi car je ne me sens pas trop à l’aise sur cette légère descente. Je me suis d’ailleurs toujours dit que la nuit j’essaierai de trouver un groupe ou une personne avec un bon tempo pour m’économiser sur la lecture du terrain. Toujours plus facile à dire qu’à faire.

La partie goudronnée qui nous emmène au ravito de Mare à Boue me confirme que je ne peux pas vraiment courir comme je veux sur le plat car ça me lance dans le mollet comme une grosse contracture. Cela ne me gêne pas trop en montée ni en descente mais sur le plat ou les parties roulantes je ne peux pas aller à mon rythme. Il va falloir composer avec sur les 110 derniers km !

A Mare à Boue km 48,4 j’arrive en 6h06. J’ai perdu quelques places mais j’ai toujours 25mn d’avance sur mon prévisionnel. Je ne m’affole pas je reprends de la soupe du coca et de la Cilaos en prévision des 10 prochains km que je sais beaucoup moins roulant en nous emmenant au coteau Kervegen.

Et c’est le cas on retrouve enfin le terrain technique boueux où progresser au rythme de la frontale est toute une affaire de concentration.

Levé du soleil vers le Volcan

La majorité de cette portion je vais rester avec un concurrent car c’est quand même plus facile d’être à 2 et de s’entraider dans cette partie montante qui nous emmène sur le rempart du cirque de Cilaos. Sur cette section on double 2 concurrents dont Nicolas Rivière, 2ème de la Diag en 2019, surement pas dans un bon jour malheureusement. Le sentier du coteau Kerveguen, coupé par un bout de descente technique, nous approche sous les premières lueurs orangées face au Piton des Neiges et à la terrible descente de Mare à Joseph. En 2 km on perd 850m de dénivelé négatif le long du rempart. Efficace pour descendre directement dans le cirque ! Je me mets devant dans la descente et lâche mon acolyte des derniers kilomètres. En bas de la descente je vois une frontale arrivée en mode fusée et me doubler sans concession … un local qui se fait plaisir dans la descente. Le jour commence à se lever et une belle journée s’annonce dans les cirques !

Cilaos, première base de « vie « 

Après, une petite descente goudronnée qui me tiraille le mollet, une remontée après le passage d’une ravine, quelques flashs et une tentative de sourire, j’arrive à la base de vie (ou de zombie pour d’autres) à 6h20 du matin après 9h20 de course en 46ème position. Au détour d’une route je vois Mathieu mon neveu (pas vu depuis 4 ans) avec un grand sourire qui court en m’indiquant que la team « Super Ravitailleur » m’attend à la sortie de la base de vie. Je traverse Cilaos en me faisant interviewer en même temps…. Le moment de raconter un peu les sensations de la première nuit et mon frère et mon père m’attendent pour le petit-déjeuner 😀 . Cela fait du bien de voir des têtes connues. Un stop d’une vingtaine de minutes, un peu long mais cela me permet de me refaire une beauté et de manger mon riz au poulet car une grosse journée nous attend. Je me fais masser le mollet pour soulager un peu la contracture et je vois aussi que la cheville interne a gonflé un peu… Bon les petits bobos c’est normal même si on préfère les voir arriver le plus tard possible. Impossible de me souvenir si j’ai cogné un caillou, un rocher ou si c’est dû à l’effort ! Je vais perdre une dizaine de place à Cilaos car les autres concurrents on fait des arrêts rapides. La première féminine Sisi Cussot me double aussi pendant que je m’hydrate à l’américaine.

Hop c’est reparti pour une belle journée chaude et ensoleillée sur les sentiers du Grand Raid. Je remercie la team Super Ravitailleur que je vais recroiser au pied du Taïbit. Le pied du Taïbit comme son nom l’indique c’est le début officiel de la montée de 800D+ pour rejoindre Mafate, mais ce qu’il ne faut pas oublier c’est que juste avant on descend à cascade Bras Rouge et qu’on remonte déjà 400D+ du fond de la ravine pour rejoindre le début « officiel » de la montée du Taïbit. En 2017 j’ai failli y rester ici car il faisait terriblement chaud. Cette année je passe tôt le matin donc le coup de chaud ça sera pour plus tard 😉 . Je recharge mes flasks et reçois les encouragements de Mathieu, Nicolas et Michel que je ne reverrai plus avant la Possession.

La montée se fait bien j’essaye de bien gérer mon effort, je reviens d’ailleurs sur la 1ère féminine un peu dans le dur que j’encourage. 1h05 pour monter le Taïbit, le tempo est bon et je file sur Marla sous le regard des 3 Salazes. Le temps est superbe et les vues sur les cirques sont magnifiques. 12h24 de course pour atteindre Marla et 35 mn d’avant sur le programme malgré mes belles pauses dans Cilaos. Les sensations sont bonnes et une belle ambiance au ravito de Marla. Je prends ma soupe de vermicelles et je trouve un siège pour m’assoir un peu quand tout à coup tout s’affole. L’hélico arrive avec Bernard Montel son micro et un caméraman, les 2 premières féminines qui se font interwierver et repartent avec une pause express. Bon ben ce n’est pas le moment de s’endormir sur ses lauriers, on se bouge les fesses et je repars dans leur sillage.

On arrive à la Plaine des Tamarins et à la mi-course (en termes de kilomètres) et je gravite entre la première et la 2ème féminine avec l’hélico au-dessus ou à côté de la tête. Bon je sais très bien qu’il n’est pas pour moi, mais ça incite tout de même à pousser sur les cuissots 😀 . Cette partie est vraiment féérique et j’en profite pour faire des photos sur la montée du col des Bœufs.

Massage massalé pimenté

A la plaine des Merles je raconte mon petit bobo au mollet et tout le ravito m’invite à aller voir les kiné(e)s… J’hésite car je suis dans une bonne phase depuis Cilaos et je n’ai pas envie de faire trop de tourisme. Bon je me laisse tenter car ça tire et je me dis qu’un massage ne me fera pas de mal…. Ouch !!! je vais servir de cobaye à une école de kiné car j’entends « là tu vois c’est dur ici il faut appuyer très fort » … Tout le monde est autour de moi et allongé sur le ventre je me fais triturer le mollet… Je vais verser ici ma petite larme tellement les kinés appuient fort sur la contracture… Je leur dis d’y aller doucement mais … pas assez fort surement et j’ai même peur que « le massage » me déclenche des crampes. Après 3mn de souffrance je remercie tout le monde et je repars. Toute l’équipe me demande si ça va mieux et je réponds que là maintenant oui depuis quelques secondes 😀

Je vais passer une bonne partie du Sentier Scout avec Gaël un trailer auvergnat fraichement installé sur l’île que j’avais croisé déjà après Cilaos. Il a déjà fait 3 fois la Diag et compte mettre un peu moins de 30h … Oulà bel objectif ! Son rythme me va bien et on discute pas mal sur la portion qui nous amène au Sentier Scout pour un retour dans le cirque de Mafate. On redouble même la 1ère féminine Émilie Maroteaux qui marche. Je l’encourage en lui expliquant qu’il faut essayer de courir ici pour ne pas perdre trop de temps… Elle me mettra 40mn à l’arrivée 😀 . De temps en temps on a des fusées réunionnaises qui nous double dans les descentes. A l’amorce du Sentier Scout, je me dis que je vais commencer un peu à faire les descentes en me mettant devant et prendre mon rythme. Une bonne initiative car je lâche mon compagnon et je rattrape les fusées. Il y en a même une qui va se faire un joli roulé-boulé en essayant de me suivre. Je l’aide à se relever lui redonne ses lunettes et je continue ma descente dans le coeur de Mafate. Il commence à faire chaud dans les petits coups de cul qui nous amènent à Ilet à bourse, mais les sensations sont au top et je prends vraiment du plaisir sur les sentiers.

Le coeur de Mafate chauffe

J’arrive à Ilet à Bourse en 15h34 et à la 45ème place avec 50mn d’avance sur mon prévisionnel. Je commence à sentir autour de moi que les coureurs sont en surchauffe avec une lassitude pour certain. Je prends de l’eau et un petit jus d’orange péi pour prendre quelques vitamines mais je repars direct car le prochain ravitaillement sera plus conséquent.

Une demi-heure après j’arrive avec la banane et la patate bientôt dans la bouche à Grand Place les bas. Le jet d’eau est de sortie et je fais mon rituel soupe vermicelle, 30 cl de coca + bonus Cilaos et je recharge toutes mes flasks en prévision de la prochaine section qui s’annonce terrible. 2 gourdes de 250ml d’eau et 1 flask de 500ml moitié coca moitié eau et l’autre moitié Cilaos et moitié eau. C’est la recette depuis le début de la journée dans les cirques. Je me rince et rafraîchis les jambes mais pas la tête car dès qu’on commence il faut continuer.

Le corps en surchauffe

La prochaine section sera pour moi encore pour la moitié du pur plaisir puis la remontée aux enfers… du ravitaillement on rejoint Grand Place les Hauts 300 / 400 de D+ exposé plein soleil. Je rattrape un concurrent Charley qui s’arrête prendre un peu d’eau que lui propose un mafatais. A Grand Place les Hauts on peut apprécier la terrible descente sinusoïdale et faite de marches nous emmenant au fond de la Rivière des Galets. Un coureur avec son assistance, dans le mal, s’est arrêté en fixant cette descente. Il la fixe comme on fixe un trou d’eau avant de s’y jeter 10m plus haut. Un petit encouragement et on se lance dans les entrailles de Mafate. La descente se passe bien et je vois des coureurs qui se baignent quasiment dans la rivière. Au passage de celle-ci je trempe ma casquette car il faut reconnaitre que nous sommes redescendus bas et on doit frôler la canicule. J’attaque la montée au tempo de Roche Ancrée et je reviens petit à petit sur les concurrents devant quand tout à coup le moteur se met en surchauffe, la vue se trouble et les zig zag commencent sur la montée sinueuse vers Roche Plate. Commence alors pour moi un véritable calvaire, je n’avance plus, j’ai chaud et j’ai envie de vider d’une traite mes flasks et de m’arrêter à chaque pas… Après 40km topissime sur les sentiers voilà le gros coup dur que je n’avais pas vu venir. Sur la 2ème moitié de Roche Ancrée je vais perdre 30mn et me faire rattraper par tous ceux que je venais de doubler, histoire de me mettre un bon coup au moral. En plus le ravito a changé cette année et il faut encore monter sur le plateau cerf 15/20mn de plus … les 20 mn d’horreur, de bad trip, « qu’est-ce que je fou là », « c’est fini ces conneries », « fait trop chaud », les mains sur les hanches le regard qui ne peut pas regarder plus haut que les chaussures et en n’arrivant même plus à tourner la tête vers les bénévoles et randonneurs qui m’encouragent « chaleureusement ».

Mafate

J’arrive au ravitaillement sans arriver à me ravitailler et les bénévoles me proposent de me poser sur une civière… en voyant ma tête ils prennent ma tension, mon taux de glycémie, mon pouls et je finis sous ma couverture de survie pour une quinzaine de minutes. On m’apporte de la soupe et du coca et j’essaye péniblement de me lever. Un hélico est à l’approche pour récupérer le staff médical. Bon ben là plus le choix il faut se bouger et repartir avant que l’hélico arrive. Un peu avachi devant le stand je remplis mes flasks et je repars, sous les encouragements des bénévoles, encore un peu hagard. C’est le moment qu’on a tous une fois, où tu sais plus où tu es, tu ne sais pas où il faut repartir et malgré les indications tu pars n’importe où … « non non à gauche » … « ah oui d’accord merci » 😀

La partie qui suit est un peu plus à l’ombre et je récupère petit à petit de mon coup de chaud en grimpant direction de la Brèche. Cette année changement de parcours puisque nous redescendons vers l’Ilet aux Orangers via une descente en gros cailloux qu’un concourant m’avait vendu comme facile mais qui finalement reste technique.

Arrivée à Ilet aux Orangers, après une petite remontée, je tombe sur Cathy à qui j’avais confié un petit ravitaillement. Je lui avais dit de bien me donner tout ce que je lui avais confié au départ. Mais comme d’habitude en regardant le contenu du sachet essentiellement constitué de barres sucrés je fais une grosse moue. Je fais un signe négatif de la tête et Cathy me dit : « tu m’avais dit que je devais te forcer à prendre la nourriture même si tu voulais pas »… bon c’est vrai mais on va couper la poire en 2, je pique une compote de pomme un bout de comté et hop direction Ilet aux Lataniers.

Cette nouvelle partie nous fait rester encore une bonne quinzaine de kilomètres dans Mafate en descendant encore au fond de la Rivière des Galets où je prends l’option de déchausser pour ne pas tremper les chaussures et les pieds lors du passage dans l’eau car la nuit ne tardera pas et c’est un coup à avoir les pieds humides au moins jusqu’à la possession. Et comme à chaque fois après être allé au fond de la ravine et bien on remonte de l’autre côté 😀

Deux Bras, deux Jambes et la tête

Juste avant d’arriver à Deux Bras, il est temps de ressortir la frontale. La 2ème base de vie est immense et peu de coureurs sont présents. Les bénévoles sont en train de manger pendant que je prends de l’eau et l’odeur du rougail saucisse et la vue de la dodo commencent à me faire saliver. On rigole avec les bénévoles mais je me rabats finalement sur du riz poulet boucané accompagné de quelques lentilles. Un bon plat bien costaud en prévision de ce qui nous attend. J’essaye de ne pas trainer pour ne pas trop me refroidir car la sortie de Mafate est synonyme de la montée de Dos d’Âne (700D+). Ce que je craignais se produisit forcément avec la remontée du poulet boucané qui en 10mn n’a pas pu être digéré… forcément ! Pas terrible comme sensation mais il vaut mieux avoir le bide bien rempli. Il me faudra 1h20 pour m’extirper de Mafate. En reco tranquille et en papotant 57mn avait été nécessaire. le delta est important mais bon on à 120 km de plus dans les jambes.

Voilà maintenant pile 24h que j’ai commencé mon aventure réunionnaise, certains sont déjà à la Redoute alors qu’il me reste encore 35km !!!

Ça râle du côté de Kala et Ratineaud…

A partir de là je connais bien mais je vais avoir une grande lassitude pour rejoindre la Possession où je vais enfin retrouver ma team Super Ravitailleur. Les sentiers sont très accidentés, techniques… On s’accroche, se jette aux lianes, aux arbres, on est obligé de lever les pattes en montant, en descendant… Pour les connaisseurs avez-vous remarqué cet énorme pneu de tracteur posé au fond du sentier ? et comment a t-il bien pu arriver là ? Enfin la descente vers la Possession et bien c’est que des gros cailloux freinant péniblement la progression. Je râle tout seul et m’agace dès que je franchis un caillou un peu trop gros 😀

Après 1h45 de gros mots sur les cailloux péï me voici enfin à la Possession où je finis de râler une bonne fois pour toute aux zoreils de mon assistance de choc 😀 , parée à tous mes états d’âme.

Je fais un compte-rendu de mes péripéties des 75 derniers km pendant un massage toujours à ce satané mollet. La petite pause me fait du bien psychologiquement car ça fait 4h que je suis seul !

Après un peu plus de 138km et 26h17 de course, on va attaquer la dernière partie du parcours avec le Chemin des Anglais. Cette année comme je passe au beau milieu de la nuit je ne vais pas souffrir de la chaleur, mais c’est quand même assez fou car on sent néanmoins la chaleur emmagasinée et qui émane des pavés volcaniques.

Je vais revenir sur un coureur sur la fin de la section qui était parti en vague 2, ça sera le premier et le dernier !

J’appréhendais ce chemin menant à la Grande Chaloupe mais finalement il passe bien même si la dernière descente est vraiment chaotique.

les pavés alignés au millimètre

A la Grande Chaloupe je reprends une soupe en tête à tête avec une bénévole. Je ne sais plus vraiment ce que je lui dis, je ne sais pas vraiment si elle m’écoute mais j’ai du faire un monologue de 2, 3mn.

En repartant le frérot, mon père et ma mère m’encourage et me donne RDV à la Redoute !

Le ravito des plaintes

Je repars au tempo et je reviens sur Yoann avec qui on va parcourir la dernière partie jusqu’à la Redoute. On discute un peu et on a le même tempo. On monte direction Saint Bernard et je commence à avoir envie de dormir … Je suis à 10km de l’arrivée et je pique du nez !!!… C’est pas possible ! je m’efforce à parler à mon cerveau pour lui mentionner ce petit détail et à remettre le et la dodo dans une grosse heure.

On arrive au dernier ravito au Colorado et il nous reste plus qu’à descendre sur Saint Denis. La descente est attaquée prudemment car ça serait dommage de se faire mal si proche du but. Au milieu de la descente on entend revenir sur nous un coureur … dossard jaune … et mince une place de perdue.

J’avoue avoir lancé à l’assistance que la place ne m’intéressait pas à la Possession mais je n’ai pas non plus envie de voir passer un wagon de coureurs sur les 3 derniers kilomètres. On accélère progressivement quant tout à coup on voit 2 petites loupiotes revenir sur nous. Ça parle kréol, 2 réunionnais … ah ben mince alors !!! en plus ils descendent bien et se rapprochent.

Je lance à Yoann ça se trouve se sont des coureurs du Zembrocal ! Pas vraiment de réponse de sa part… oui comme celui qui vient de passer je me remémore…ni une ni 2 on se met à descendre à tombeau ouvert en débranchant le cerveau… On prend clairement un risque de chute en descendant comme cela mais finalement on maintien la distance avec les coureurs derrières. Je commence à galérer à suivre Yoann et je me remets même à transpirer à grosse goutte à courir aussi vite 😀

La Re.. LA RUN… LA REDOUTE LÉ LÀ !!!

On arrive à tout berzingue et on attaque la dernière portion de plat à vive allure. J’ai perdu quelques longueurs mais je fonec direction le stade car je ne veux pas prendre le risque de perdre une place à 300m de l’arrivée. Nicolas et Mathieu ont du mal à me suivre en courant à côté de moi.

A la fin de la ligne droite on traverse la route pour rentrer dans le stade de la Redoute, l’endroit de la délivrance, de la fin de cette diagonale et de cette aventure… l’émotion est forte et d’autant plus que je vois Khladia et les enfants (en pyjama 😀 ) qui sont là ! je récupère Milhan que je prends dans les bras et Malya qui court à côté de moi pour franchir la ligne d’arrivée !

Une belle arrivée en plein milieu de la nuit en mode un peu plus intimiste mais comblé par la présence de toute ma famille, l’essentiel en somme !

Après 1 ou 2 minutes à pas vraiment, ni réaliser, ni savoir où me tourner, je récupère mon maillot « j’ai survécu » ma médaille et je profite des sourires de tous mes proches !

Quelle aventure ! Traverser cette île et ses 162km, 9500 de D+ en 30h36 à la 36ème place, il faut avouer que c’est bien mieux que ce que j’espérais. Je pensais mettre au moins 2h de plus ! J’ai mis 11h de moins qu’en 2017 😀 …

« J’ai survécu« 

Un grand merci à tous ceux qui m’ont envoyé leurs encouragements et qui m’ont suivi sur la traversée de cette Diagonale des Fous millésime 2021. Vous étiez nombreux et cela m’a touché et impressionné…vraiment !

Une pensée spéciale à tous mes proches sur place qui font totalement partie de l’aventure ! Meeerrrrrcccciiiii

Et vous savez ce qu’on dit … jamais 2 sans 3, mais bon pas pour tout de suite, on va profiter maintenant 😀

La Traversée Nord de Belledonne 2020 – L’ultra Traversée

 

« Ce n’est pas une sous course de l’Échappée Belle intégrale » annonce lors du briefing de départ Florent Hubert, « La traversée nord c’est une course exigeante, à part entière… » Voici les quelques mots retenus lors du speech, quelques secondes avant le départ.

Elle n’était pas vraiment prévue au programme de cette année, ayant terminée en 2019 l’intégrale, mais ça doit être le petit côté maso que tous les traileurs ont en eux… on la sait belle mais dure et c’est surement pour ces 2 qualificatifs qu’on a un goût de reviens-y.

180 sur liste d’attente au moment de l’inscription fin mai, date à laquelle Paul m’a chauffé par sms un soir déconfiné, mais avachi sur mon canapé. Je me suis mis sur liste d’attente sans vraiment d’espoir et pourtant en juillet on m’envoyait un email pour valider mon dossier.

Allez c’est reparti pour un tour, enfin non, une traversée ! La partie nord de Belledonne, avec la chance cette fois de faire une belle partie de jour. L’année dernière, de la montée à la Grande Valloire jusqu’au-dessus de super collet c’était de nuit.

Après l’annulation du 90 km du Mont Blanc et l’Ultra Trail du Beaufortain et bien cet été ça sera l’Oisans Trail Tour et la Traversée Nord. L’OTT 1 mois avant a été une belle préparation et la première course de la saison avec ses 12h dans les sentiers de l’Oisans, une bonne mise en bouche pour se frotter aux sentiers plus bruts, abrupts et rudes de Belledonne. Clairement la distance est la même, plus de deniv sur Belledonne, mais le temps ne sera pas de 12h. Dans ce massif il faut aimer descendre prudemment, taper les bouts de pieds sur les rochers, tenter de mettre du rythme et perdre son influx nerveux, monter lentement et voir défiler tranquillement les montagnes.

Samedi 22 août à 1h30 le réveil sonne, je saute dans mes habits préparés 3h auparavant je prépare 2 cafés car Paul me récupère à 2h direction les 7 Laux côté Pleynet. On arrive 45 mn avant le départ, la température est douce et on devrait éviter la chaleur que subisse les coureurs de l’intégrale depuis vendredi.

Le sac est sur le dos avec tous le matos, Paulo lui ça sera en débardeur ( 😀 , facile celle-là).

Lavage de main masque sur le pif, tout le monde respecte les règles et l’organisation a totalement bien géré ce côté-là pour que l’évènement puisse se tenir.  Pour cela un GRAND MERCI aux bénévoles et l’orga car l’annulation est plus facile au regard des protocoles à mettre en place. Quand on sait que 500 bénévoles ont gardé la motivation, malgré les contraintes et bien je leur tire ma casquette !

Sur la ligne de départ, on est juste derrière la musculeuse Mimmi. Paul l’an dernier a mis 15h cette année il vise plus et on a fait un plan en 16h avec comme stratégie de partir prudemment et si on peut, accélérer à la fin (tant qu’à faire).

Départ à 4h15 pour notre première vague et un petit tour de chauffe dans la station… ça part directement dans la montée et assez vite. Toute la première partie se gère bien à la frontale sur les sentiers qui nous emmènent vers Fond de France… il fait assez lourd même à cette heure matinale et je tente quelques blagues avec mes copains du moment que je trouve un peu trop sérieux à mon goût.

Hop on tourne sur la droite et on va attaquer la 1ère montée de Valloire, un sentier en forêt qui se découvre sur le haut. Avec Paul on suit un coureur qui nous emmène sur un bon rythme, la montée se fait bien, je suis à l’aise, Paul décroche à 2, 3 moments car il avait le cardio un peu haut mais recolle rapidement.  On attaque ensuite des petits singles en traversée où je loupe totalement un appui et je mets le pied gauche dans le vide … une belle glissade sur l’herbe heureusement sans dommage. Ce type de maladresse il faut vraiment les éviter sur Belledonne car ça peut te valoir un arrêt définitif. La descente sur Gleyzin se fait sans problème et on arrive au bout de 2h42 avec 2 minutes de retard sur notre prévisionnel et à la 38ème place. Le rythme est bon et on recharge en eau, un verre de coca 2, 3 morceaux de banane et c’est reparti pour la montée sur le refuge de l’Oule puis du Moretan, un gros morceau du parcours.

La montée est raide mais le temps est frais donc on ne souffre que du terrain 😉 , on prend même un petit crachin histoire de nous mettre dans l’ambiance de cette montée mythique de l’Échappée Belle. Le rythme est bon, on ne traine pas… je commence à voir un peu à ce moment-là que tous mes copains sont bien penchés sur leurs bâtons et que mes cuisses et mollets tirent un peu pour suivre leur rythme. Préparation Grand Raid oblige, pas de bâtons pour la traversée… il faut bien être joueur un peu quand même.

En arrivant sur les 300 derniers mètres les nuages se dispersent et on peut enfin apprécier les paysages somptueux de col. Paul repasse devant et les bénévoles au taquet nous accueillent au son des cloches. S’en suit après la terrible descente avec cordes sur le névé dans un premier temps, puis sur l’arrête dans un second temps.

Pas super à l’aise je laisse filer Paul et je tente la partie névé sur les fesses en prenant très rapidement de la vitesse avec une perte totale de ma trajectoire. J’essaye de me ralentir avec les mains, mais ça brûle…. Je double mais en direction des rochers qui se rapprochent dangereusement… En arrivant dessus je pousse avec mon pied pour me détourner de l’autre côté… La hanche est toujours en place mais j’ai eu chaud. S’ensuit une danse crispée à gauche à droite autour de la longe sur une bonne centaine de mètre de D-.

Après cette descente un peu chaotique pour ma part (comme l’an dernier, on ne se refait pas), les mains brulées par la neige puis la corde, on arrive sur les superbes lacs supérieur et inférieur et une plaine verdoyante nous amenant au ravito de Perioule (29ème). Je pers un peu de temps à mettre de l’eau dans les gourdes car il y a un peu la queue. Paul repart direct il fait des ravitos beaucoup plus efficaces que moi … il a progressé par rapport à l’UT4M 2018 par rapport à ça !

J’essaye, sur la descente qui suit, de me remobiliser pour rattraper les coureurs devant et en voulant imiter un chamois, au détour d’un cailloux, une belle crampe se déclenche partant de l’intérieur du mollet et remontant le long de l’ischio… coucou Tibo c’est moi la petite crampe qui vient au 30ème km tu sais comme à Madère et à l’ultra tour du Haut Giffre, on s’était bien marré les 50 derniers kilomètres ensemble hein ? Arghhh…. !!!!

A ce moment-là tout change, tu passes en mode gestion, attends je bois, j’ouvre une barre que je n’ai pas envie de manger et que je ne vais pas réussir à manger, je vais croquer ma tablette de magnésium potassium… Ah mince je ne la trouve pas … attend de l’arnica montana allez hop 20 granules qui tombent dans le bec car j’ai dévissé le système …

C’est à ce moment-là, où dès que tu croises une personne tu te transformes en pleurnichard aux excuses bidon et que tu balances à tout va que tu es pris de crampes et que tout le monde s’en fou… tu cherches la compassion mais tu n’en n’as pas, tu espères une solution miracle mais là aussi ça n’existe pas.

Le moindre pas doit être fait de manière non brutale en essayant de caresser le sol, comme si tu voulais cacher à ton muscle que tu courrais, afin d’éviter la terrible contraction. Le moral en plus du physique commence à battre de l’aile… l’aile ou la cuisse il faut choisir… j’aimerais bien m’envoler au-dessus de cette montée rectiligne de la pierre du carré, mais à cet instant je le sais, pour rejoindre le prochain ravito je vais être collé, super hein ?! 😀

J’arrive enfin à la station du super collet, avec 7 mn de retard sur le prévisionnel mais en ayant évité de nouvelles crampes. Malheureusement à peine assis sur une chaise, celles-ci reviennent m’empêchant de m’assoir, la soupe et le ravito ça sera donc debout. Je me plains 2 mn à Paul qui super sympa me remplit mes flasks. Je lui dis de partir et de ne plus m’attendre car je suis plus dans le rythme.

Après un bon ravito je repars en ayant perdu 4, 5 places. La prochaine partie sur les crêtes des Ferices et Arpingon est aussi redoutable quelle est magnifique. Il va falloir gérer et essayer de se remobiliser. Toutes les montées sont un calvaire je suis dans le creux de la vague, je me demande ce que je fais ici et pourquoi je fais des ultras et patati et patata … j’essaye d’appuyer sur les cuisses et de remettre du rythme mais rien ni fait, la tête est partie broyer du noir et l’énergie a déserté mon corps… tu traines ton poids et ça ne passe pas… je bois, je mange et je prends mon mal en patience. Dans les montées je vois à chaque fois Hilary Allen (1ère féminine) me déposer avec une facilité déconcertante dans les montées, et je la reprends à chaque fois dans les descentes…mais dans Arpingon elle prend son envol et moi je reste collé à mes amis les cailloux.

J’arrive enfin à Val Pelouse où je décide de faire un bon ravitaillement soupe, fruits, coca etc… J’ai quand même 17 minutes de retard sur mon prévisionnel. Je tombe sur James qui me dit que même si j’en ai chié je suis plus frais que beaucoup de coureurs qui viennent de repartir devant moi. Ça me redonne un peu le moral et je repars après avoir fini ma soupe pour les 30 derniers km. La stratégie voulait qu’à partir de maintenant on commence à envoyer… je retrouve un rythme sympa dans les montées et le moral va mieux.

En haut du col de la perche je commence à revenir sur des coureurs de mon parcours…je décide d’embrayer et de faire une descente soutenue jusqu’au Pontet. En plus, à l’avant dernier ravitaillement, je sais que Khaldia et les enfants seront là. Rien que d’y penser cela me fait un bien fou, je déroule et rattrape quelques coureurs. Ah enfin je retrouve le mode guerrier et je profite de ces moments d’euphorie. Je me dis qu’il faut que j’essaye d’aller le plus vite possible et que je ne lâche rien jusqu’à l’arrivée. Je sens bien que je suis rapide dans les descentes, les cuisses vont bien et les trajectoires sont bonnes.

J’arrive au Pontet en 20ème position et dans les temps de mon prévisionnel. La famille est là pour m’encourager, je leur explique que je ne traine pas trop car je me sens bien. Milhan et Malya courent à mes côtés et c’est un super moment.

La montée du Fort Gilbert je l’a fait au tempo et je ne lâche rien. C’est à ce moment-là que tu te dis que la tête joue pour beaucoup. Je rattrape encore 2 coureurs dans la montée et j’enchaine sur la descente… enfin presque, car il y a un petit raidard cadeau juste avant la dernière longue descente qui nous emmène vers Aiguebelle. La descente est roulante et j’envoie tout ce que je peux en descendant à 4’20 4’30 du km… 5 km avant l’arrivée je redouble Hilary puis un autre coureur. C’est assez incroyable le temps que l’on peut récupérer si on arrive à finir une course avec du jus. A l’entrée du parc je vois Kahldia et les enfants qui arrivent tout juste car sur la dernière portion j’ai repris pas mal de temps sur le prévisionnel. La cloche retentit au bout de 15h32 d’effort avec une 16ème place, un peu inespéré pour les 87km et 6100 D+ (dans Belledonne 😉

Une belle expérience de plus, une super course, une organisation au top pour une ultra traversée !